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jurisprudence

Conseil d’Etat, 31 mars 2010, n° 334279, Collectivité Territoriale de Corse - Mentionné dans les tables du recueil Lebon

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000022057649/

Conseil d’État

334279

Mentionné dans les tables du recueil Lebon

7ème et 2ème sous-sections réunies

M. Arrighi de Casanova, président

Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, rapporteur

M. Boulouis Nicolas, commissaire du gouvernement

SCP PIWNICA, MOLINIE, avocat(s)

lecture du mercredi 31 mars 2010

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 et 17 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, dont le siège est 22, cours Grandval, à Ajaccio (20000), représentée par le président de son conseil exécutif ; la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 17 novembre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bastia, statuant en application de l’article L551-1 du code de justice administrative, a annulé, à la demande du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères, la procédure de passation du marché de travaux d’aménagement d’un créneau de dépassement dans la commune de Casalabriva - RN 196 ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères devant le tribunal administratif de Bastia ;

3°) de mettre à la charge du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères le versement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Auditeur,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE ;

Considérant qu’aux termes de l’article L551-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à l’espèce : Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics (...). Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement (...). Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations (...) ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bastia que, par un avis d’appel public à la concurrence du 18 juin 2009, la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE a engagé une procédure de passation d’un marché ayant pour objet l’exécution des travaux d’aménagement d’un créneau de dépassement sur la route nationale 196, dans la commune de Casalabriva ; que cet avis précisait que l’offre économiquement la plus avantageuse serait déterminée en fonction de la valeur technique de l’offre retenue pour 60 % et du prix des prestations pour 40 % et que le critère de la valeur technique de l’offre serait évalué pour moitié en fonction d’une part de l’organisation du chantier, du phasage et du planning afin de respecter les délais, d’autre part de la provenance et de la qualité des matériaux ;

Considérant que, pour annuler la procédure de passation de ce marché relevant de la procédure adaptée, le juge des référés s’est fondé sur ce qu’en ne faisant pas figurer dans les documents de consultation la méthode de notation retenue pour apprécier le critère de valeur technique des offres, le pouvoir adjudicateur avait méconnu les obligations de publicité et de mise en concurrence qui s’imposaient à lui en vertu des principes qui découlent de l’exigence d’égal accès à la commande publique rappelés par le II de l’article 1er du code des marchés publics applicable à tous les contrats entrant dans le champ d’application de celui-ci ; que toutefois si, pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, le pouvoir adjudicateur a l’obligation d’indiquer dans les documents de consultation les critères d’attribution du marché et leurs conditions de mise en oeuvre, il n’est en revanche pas tenu d’informer les candidats de la méthode de notation des offres ; que, par suite, en jugeant irrégulière la procédure en cause, au motif que les documents de consultation ne comportaient pas cette indication, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a commis une erreur de droit ; que dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;

Considérant que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application de l’article L821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée par le groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères sur le fondement de l’article L551-1 du code de justice administrative ;

Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de ce qui vient d’être dit que le groupement requérant ne peut utilement soutenir que les documents de consultation auraient dû comporter des indications sur la méthode de chiffrage retenue pour apprécier le critère de la valeur technique des offres et sur la méthode d’évaluation des offres lui permettant d’apprécier le critère tenant au prix des prestations ;

Considérant, en deuxième lieu, que le pouvoir adjudicateur, à qui il était loisible de définir des sous-critères permettant d’apprécier la valeur technique des offres, pouvait, eu égard à l’objet du marché, retenir que celles-ci seraient appréciées en tenant compte de la provenance et de la qualité des matériaux ; qu’il n’avait pas à préciser, au-delà de ce qu’il a fait, la portée qu’il donnait à la provenance des matériaux, laquelle constitue un des éléments d’appréciation de leur qualité ; que la seule circonstance que ces matériaux devaient répondre aux normes minimales fixées par un label n’enlevait pas sa pertinence au critère de qualité retenu par l’appel d’offre ; que le sous-critère relatif à l’organisation du chantier, le phasage et le planning afin de respecter les délais tendait à mesurer la capacité technique de l’entreprise à respecter des délais d’exécution prévus dans les documents contractuels ; qu’il était ainsi en rapport avec l’objet du marché et n’avait pas à être individualisé sous la forme d’un critère à part entière ; qu’il y a lieu dès lors d’écarter les moyens du groupement tirés de l’absence de pertinence et de l’imprécision des critères retenus ;

Considérant, en troisième lieu, que, si le groupement requérant soutient que le pouvoir adjudicateur a méconnu ses obligations de mise en concurrence en ignorant le sous-critère d’attribution relatif à l’organisation du chantier, le phasage et le planning afin de respecter les délais au cours de la phase d’analyse des offres, il ressort toutefois du rapport d'analyse des offres que ce sous-critère a fait l’objet d’une évaluation pour tous les candidats et que la notation obtenue à ce titre par le groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères, la plus basse par rapport aux autres candidats, résulte notamment de l’incohérence technique de son planning d’exécution des travaux ; qu’ainsi le moyen manque en fait ;

Considérant, enfin, que, si le groupement requérant soutient que le pouvoir adjudicateur a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en omettant de lui indiquer les motifs pour lesquels son offre a été rejetée, ne le mettant pas ainsi en mesure de contester utilement ces motifs devant le juge des référés précontractuels, il résulte de l’instruction que, par un courrier du 9 novembre 2009, la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE a fourni à ce groupement les motifs de son éviction ; qu’ainsi, ce moyen manque en fait ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la demande du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées en application des dispositions de l’article L761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères la somme de 3 000 euros que la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L’ordonnance du 17 novembre 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Bastia est annulée.

Article 2 : La demande du groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères devant le juge des référés du tribunal administratif de Bastia est rejetée.

Article 3 : Le groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères versera à la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE une somme de 3 000 euros au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE et au groupement d’entreprises STPS, Lopez Francis et Spanu Frères.

MAJ 15/04/10 - Source legifrance

Jurisprudence

CAA Nantes, 6 juillet 2017, n° 16NT01702, Société EERI (La trame de la décomposition du prix doit être respectée de manière à rendre possible la comparaison des offres. Les critères de jugement des offres et leurs modalités d'application doivent être suffisamment précis, notamment en ce qui concerne les éléments demandés dans le mémoire technique utilisé pour le critère de la valeur technique de l'offre, pour ne pas laisser à l’acheteur une liberté de choix discrétionnaire susceptible de méconnaître les principes d'égalité des candidats et de transparence des procédures).

CJUE, 14 juillet 2016, TNS Dimarso NV contre Vlaams Gewest, aff. C-6/15 (« dans le cas d’un marché de services devant être attribué selon le critère de l’offre économiquement la plus avantageuse du point de vue du pouvoir adjudicateur, ce dernier n’est pas tenu de porter à la connaissance des soumissionnaires potentiels dans l’avis de marché ou le cahier des charges relatifs au marché en cause la méthode d'évaluation appliquée par le pouvoir adjudicateur afin d’évaluer et de classer concrètement les offres. En revanche, ladite méthode ne saurait avoir pour effet d’altérer les critères d’attribution et leur pondération relative »).

CE, 3 novembre 2014, n° 373362, Commune de Belleville-sur-Loire (Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en oeuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics. Il n’est en revanche pas tenu d’informer les candidats de la méthode de notation des offres. Par contre ces méthodes de notation ne doivent pas être de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération).

CE, 19 avril 2013, n° 365340, Ville de Marseille (L'incertitude résultant de la méthode de notation des offres, et son adaptation lors de l'analyse des offres par le pouvoir adjudicateur porte atteinte au principe d'égalité entre les candidats)

CE, 2 août 2011, n° 348711, SIVOA (L'acheteur peut recourir à une simulation financière pour évaluer les offres. Pour l'appréciation des critères de sélection des offres il faut bien distinguer critère et simple méthode de notation des offres. En procédant à une simulation nécessaire à l’appréciation du critère du prix eu égard à la coexistence de prix forfaitaires et de prix unitaires, le pouvoir adjudicateur met en oeuvre une simple méthode de notation destinée à évaluer ce critère, sans modifier ses attentes définies dans le règlement de la consultation par les critères de sélection et donc sans poser un sous-critère assimilable à un critère distinct. En effectuant, pour évaluer le montant des offres qui lui sont présentées, une simulation consistant à multiplier les prix unitaires proposés par les candidats par le nombre d'interventions envisagées, un pouvoir adjudicateur n'a pas recours à un sous-critère, mais à une simple méthode de notation des offres destinée à les évaluer au regard du critère du prix. Il n'est donc pas tenu d'informer les candidats, dans les documents de la consultation, qu'il aura recours à une telle méthode).

CE, 21 mai 2010, n° 333737, Commune d'Ajaccio (En matière d'allotissement, le juge du référé précontractuel ne peut sanctionner qu'une erreur manifeste d’appréciation du pouvoir adjudicateur dans la détermination du nombre et de la consistance des lots eu égard à la nature des prestations et à l’objet du marché).