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jurisprudence

CAA  de Marseille, 4 décembre 2006, n° 04MA01042, Société SAS ONET SERVICES c/ Conseil Général des Bouches-du-Rhône

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000018001449/

Dans le cadre de la procédure d'appel d'offres, l'organisation d’une réunion d'information pour des candidats au cours de laquelle ils ont pu bénéficier d'informations, alors même que les dossiers de consultation continuaient à être adressés porte atteinte au libre jeu de la concurrence et au principe d'égalité des candidats à un marché public ; elle doit être regardée comme constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité quasi-délictuelle de la personne publique.

La responsabilité du maitre d’ouvrage est cependant atténuée si le titulaire du marché a participé à la réunion, qu'il a pu ainsi obtenir des informations ayant faussé la concurrence et favorisé son choix en qualité d'attributaire du marché.

Cour Administrative d'Appel de Marseille

statuant

au contentieux

N° 04MA01042

Mentionné aux Tables du Recueil Lebon

Lecture du 4 décembre 2006

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 mai 2004 sous le n° 04MA01042, présentée par Me Trolliet, avocat, pour la société SAS ONET SERVICES, dont le siège social est 20 traverse de Pomègues à Marseille (13008), représentée par son président directeur général en exercice ;

La société SAS ONET SERVICES demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0001838 du 13 janvier 2004, notifié le 18 mars 2004, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la société anonyme ONET PROPRETE tendant à la condamnation du département des Bouches-du-Rhône à lui verser l'indemnité de 799.305, 70 F (soit 121.853, 37 euros) pour rupture brutale et abusive du marché n° 302 relatif au nettoyage des locaux des sites déconcentrés du conseil général ;

2) de condamner le département des Bouches-du-Rhône à lui verser l'indemnité de 46.014, 56 euros (301.835, 71 F) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2000 et du produit de leur capitalisation ;

3) de le condamner à lui verser la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 19 avril 2006, présenté par Me Alias, avocat, pour le département des Bouches-du-Rhône, représenté par le président du conseil général en exercice, qui conclut au rejet de la requête et demande que la Cour condamne la société appelante à lui verser la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2006 :

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- les observations de Me Trolliet pour la société SAS ONET SERVICES et de Me Alias pour le département des Bouches-du-Rhône,

- et les conclusions de Mlle Josset, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un acte d'engagement du 23 juillet 1999, la société ONET PROPRETE a obtenu le marché public de nettoyage de locaux du département des Bouches-du-Rhône pour un montant annuel de 2.430.000 F TTC ; qu'en raison d'une irrégularité ayant affecté la procédure de mise en concurrence des candidats et par suite au principe d'égalité d'accès de ces derniers à un marché public, à la demande du préfet des Bouches-du-Rhône, l'attribution de ce marché a été retirée et son exécution interrompue à compter du 16 mars 2000 ; que la société ONET PROPRETE a demandé au Tribunal administratif de Marseille l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis de fait de ce retrait ; que par le jugement attaqué, le tribunal, qui a déclaré nul le marché litigieux, a rejeté cette demande indemnitaire au motif que la société requérante se bornait à invoquer la rupture abusive d'un contrat qui ne peut faire naître d'obligations entre les parties compte-tenu de sa nullité ; que la société ONET SERVICES interjette appel de ce jugement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le département intimé :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante de première instance ONET PROPRETE et la société appelante SAS ONET SERVICES constituent la même société anonyme enregistrée au registre du commerce et des sociétés de Marseille sous le n° 067800425 ;

Considérant, d'une part, que cette société était représentée en première instance par son président directeur général en exercice, lequel dispose du pouvoir d'agir en justice au nom de sa société anonyme en vertu des dispositions de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;

Considérant, d'autre part, que la requête d'appel a été signée par M. Alain Brousse ; qu'il résulte de l'instruction que la société SAS ONET SERVICES est représentée en cause d'appel par la société anonyme SAS DIVISION PROPRETE MULTISERVICES, qui préside son conseil d'administration, elle-même représentée par son président directeur général, M. Brousse, en vertu des dispositions de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par le département intimé doit être écartée ;

Sur la demande d'indemnisation de la société :

Considérant que la société SAS ONET SERVICES a formulé en appel une demande d'indemnité fondée, d'une part, sur l'enrichissement sans cause qui serait résulté pour le département des Bouches-du-Rhône des prestations qu'elle a exécutées, d'autre part, sur la faute que cette collectivité aurait commise en passant le contrat dont s'agit dans des conditions irrégulières ;

Considérant que le cocontractant de l'administration dont le contrat est entaché de nullité est fondé à réclamer, en tout état de cause, le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé ; que dans le cas où la nullité du contrat résulte, comme en l'espèce, d'une faute de l'administration, il peut en outre prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute et le cas échéant, demander à ce titre, le paiement du bénéfice dont il a été privé par la nullité du contrat, si toutefois le remboursement à l'entreprise de ses dépenses utiles ne lui assure pas une rémunération supérieure à celle que l'exécution du contrat lui aurait procurée ;

Considérant par ailleurs que lorsque le juge, saisi d'un litige engagé sur le terrain de la responsabilité contractuelle, est conduit à constater, le cas échéant d'office, la nullité du contrat, les cocontractants peuvent poursuivre le litige qui les oppose en invoquant, y compris pour la première fois en appel et alors même que ladite nullité avait été soulevée par le département en première instance, des moyens tirés de l'enrichissement sans cause que l'application du contrat frappé de nullité a apporté à l'un d'eux ou de la faute consistant, pour l'un d'eux, à avoir passé un contrat nul, bien que ces moyens, qui ne sont pas d'ordre public, reposent sur des causes juridiques nouvelles ;

Considérant, par suite, que la société SAS ONET SERVICES est recevable à saisir le juge du fond de conclusions fondées sur l'enrichissement sans cause du département des Bouches-du-Rhône et sur la faute que cette collectivité aurait commise en passant le contrat dans des conditions irrégulières ;

S'agissant de l'enrichissement sans cause :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les prestations de nettoyage réalisées et facturées par la société SAS ONET SERVICES sur la période courant du 1er septembre 1999 au 15 mars 2000 ont été payées ; que si cette dernière réclame la somme de 301.835, 71 F au titre de la période courant du 16 mars au 22 mai 2000, elle n'a toutefois effectué aucune prestation de nature à établir que les dépenses qu'elle a exposées auraient été utiles au département des Bouches-du-Rhône ; que les conclusions de la société fondées sur l'enrichissement sans cause de cette collectivité doivent, par suite, être rejetées ;

S'agissant de la faute quasi-délictuelle :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la procédure d'appel d'offres lancée par le département des Bouches-du-Rhône en vue de la passation du marché de nettoyage en litige, des candidats ont été invités à une réunion d'information le 23 avril 1999, au cours de laquelle ils ont pu bénéficier d'informations, alors même que les dossiers de consultation avaient continué à être adressés jusqu'au 3 mai 1999 ; que l'organisation de cette réunion par le département a ainsi porté atteinte au libre jeu de la concurrence et au principe d'égalité des candidats à un marché public et doit être regardée comme constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité quasi-délictuelle de la personne publique ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la société a toutefois participé à la réunion du 23 avril 1999 et qu'elle a pu ainsi obtenir des informations ayant faussé la concurrence et favorisé son choix en qualité d'attributaire du marché ; que, dans ces conditions, le département intimé est fondé à soutenir que le fait de la victime l'exonère partiellement de sa responsabilité, dès lors que la société ONET a bénéficié de l'irrégularité qu'elle invoque et qu'elle ne pouvait ignorer ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en retenant la responsabilité du département des Bouches-du-Rhône à hauteur de 75 % ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, notamment des échanges de courriers entre les cocontractants datés de 16 mars et 21 mars 2000, et qu'il est constant, que le personnel de la société ONET qui travaillait au nettoyage des locaux du département a été immobilisé, le cocontractant ayant inutilement demandé à l'administration la reprise des contrats de travail en cours en application de l'article L.122-12 du code du travail ; que le département intimé, qui n'établit, ni même n'allègue, que ces employés auraient été licenciés ou affectés à d'autres chantiers de nettoyage sur la période de 9 semaines courant du 16 mars au 22 mai 2000, ne conteste pas l'évaluation à 301.835, 71 F (46.014, 56 euros) du coût d'immobilisation de ce personnel, incluant charges et bénéfice escompté, correspondant au montant total de la facturation émise du 1er septembre 1999 au 15 mars 2000 et appliqué au prorata sur 9 semaines ; qu'il y a lieu de condamner le département des Bouches-du-Rhône à verser à la SAS ONET SERVICES les trois quarts de cette somme, soit 34.510, 92 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SAS ONET SERVICES est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les intérêts :

Considérant que la somme susmentionnée de 34.510,92 euros portera intérêts au taux légal, en application de l'article 1153 du code civil, à compter du 11 avril 2000, date d'enregistrement au greffe du Tribunal de la requête introductive de première instance ; qu'en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts le 17 mai 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par le département des Bouches-du-Rhône, partie perdante ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAS ONET SERVICES tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 13 janvier 2004 est annulé.

Article 2 : Le département des Bouches-du-Rhône est condamné à verser à la société SAS ONET SERVICES la somme de 34.510, 92 euros (trente-quatre mille cinq cent dix euros et quatre-vingt douze centimes).

Article 3 : Ladite somme de 34.510, 92 euros (trente-quatre mille cinq cent dix euros et quatre-vingt douze centimes) portera intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2000. Les intérêts porteront eux-mêmes intérêts le 17 mai 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société SAS ONET SERVICES et du département des Bouches-du-Rhône est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société SAS ONET SERVICES, au département des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 04MA01042 5

plein contentieux

Voir également

visites des sites,

critères, critères de sélection des candidatures, dossier de candidature,

critères de choix des offres, offre économiquement la plus avantageuse, offres, pondération des critères de sélection des candidatures ou de choix des offres, information des candidats dans les procédures adaptées

système de qualification d’opérateurs économiques

Clauses sensibles dans les marchés publics d'informatique

Textes

article L551-1 du code de justice administrative

article 53 du code des marchés publics