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Le règlement de la consultation prévu par une autorité concédante pour la passation d’un contrat de concession est obligatoire dans toutes ses mentions (CE, 23 novembre 2005, n° 267494, Société Axialogic). L’autorité concédante ne peut, dès lors, attribuer ce contrat à un candidat qui ne respecte pas une des exigences imposées par ce règlement, sauf si cette exigence se révèle manifestement dépourvue de toute utilité pour l’examen des candidatures ou des offres. En l’espèce, la société requérante avait présenté sa candidature au format papier sans être accompagnée de copies dématérialisées remises par clés USB, en méconnaissance des dispositions du règlement de la consultation. Elle avait, transmis un lecteur de CD-Rom qui s’est avéré vide. L’obligation imposée aux candidats par un règlement de la consultation de déposer une version sur support numérique des dossiers de candidature n’est pas une formalité inutile, en raison notamment de ce qu’elle a pour objet de permettre l’analyse des candidatures déposées dans des délais contraints.
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000038524835
Résumé
Cette décision rappelle ainsi l'importance du strict respect du règlement de consultation par les candidats, tout en ménageant une marge d'appréciation à l'autorité concédante sur l'utilité des formalités exigées.
Cette décision apporte plusieurs précisions :
La collectivité de Corse a lancé en août 2018 une procédure de délégation de service public (DSP) pour le transport maritime entre la Corse et le continent, divisée en 5 lots correspondant aux différentes liaisons. La société Corsica Ferries a vu sa candidature rejetée au motif qu'elle n'avait pas fourni de version dématérialisée de son dossier sur clé USB comme l'exigeait le règlement de consultation.
La société a saisi le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bastia pour contester ce rejet, mais sa demande a été rejetée. Elle s'est alors pourvue en cassation devant le Conseil d'État contre l'ordonnance du juge des référés.
Le Conseil d'État rappelle tout d'abord le cadre juridique applicable :
Appliquant ces principes au cas d'espèce, le Conseil d'État valide le raisonnement du juge des référés qui a estimé que :
Le Conseil d'État juge donc que le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en validant le rejet de la candidature pour ce motif.
Le Conseil d'État rappelle que selon l'article L.1411-5 du CGCT, la commission de DSP est chargée de dresser la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties.
Il valide le raisonnement du juge des référés qui a jugé que :
Le Conseil d'État juge qu'il n'y a pas d'erreur de droit sur ce point.
Le Conseil d'État juge que :
Texte
[…]
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Bastia que, par un avis d'appel public à la concurrence publié le 8 août 2018, la collectivité de Corse a lancé une procédure pour la passation de nouvelles conventions de délégation de service public de transport maritime de marchandises et de passagers entre la Corse et le continent pour une durée de quinze mois du 1er octobre 2019 au 31 décembre 2020. Cette procédure a fait l'objet d'un allotissement en cinq lots correspondant à chacune des liaisons maritimes entre le port de Marseille et les ports d'Ajaccio, de Bastia, de Porto-Vecchio, de Propriano et de L'Ile-Rousse. Par un courrier du 13 novembre 2018, le président du conseil exécutif de la collectivité de Corse a informé la société Corsica Ferries du rejet de sa candidature, au motif qu'elle avait été présentée au format papier sans être accompagnée de copies dématérialisées remises par clés USB, en méconnaissance de l'article 6-1 du règlement de la consultation. Cette société a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à l'annulation de la décision de rejet de sa candidature et à ce qu'il soit enjoint à la collectivité de Corse de l'admettre à déposer une offre et d'engager une négociation avec elle. La société Corsica Ferries se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 18 décembre 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a rejeté ses demandes.
2. D'une part, aux termes de l'article 23 du décret du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession : " I. - Avant de procéder à l'examen des candidatures, l'autorité concédante qui constate que des pièces ou informations dont la production était obligatoire conformément aux articles 19, 20 et 21 peuvent demander aux candidats concernés de compléter leur dossier de candidature dans un délai approprié. Elle informe alors les autres candidats de la mise en oeuvre de la présente disposition. II. - Les candidats qui produisent une candidature incomplète, le cas échéant après mise en oeuvre des dispositions du I, ou contenant de faux renseignements ou documents ne sont pas admis à participer à la suite de la procédure de passation du contrat de concession. / Les candidatures irrecevables sont également éliminées. Est irrecevable la candidature présentée par un candidat qui ne peut participer à la procédure de passation en application des articles 39, 40, 42 et 44 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée ou qui ne possède pas les capacités ou les aptitudes exigées en application de l'article 45 de la même ordonnance ".
3. D'autre part, le règlement de la consultation prévu par une autorité concédante pour la passation d'un contrat de concession est obligatoire dans toutes ses mentions. L'autorité concédante ne peut, dès lors, attribuer ce contrat à un candidat qui ne respecte pas une des exigences imposées par ce règlement, sauf si cette exigence se révèle manifestement dépourvue de toute utilité pour l'examen des candidatures ou des offres. Une candidature doit être regardée comme incomplète, au sens de l'article 23 du décret du 1er février 2016, quand bien même elle contiendrait les pièces et informations dont la production est obligatoire en application des articles 19, 20 et 21 de ce décret, dès lors qu'elle ne respecte pas les exigences fixées par le règlement de la consultation relatives au mode de transmission de ces documents, sous réserve que ces exigences ne soient pas manifestement inutiles.
4. En premier lieu, il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que, pour rejeter la demande de la société Corsica Ferries, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que l'obligation imposée aux candidats par l'article 6-1 du règlement de la consultation de déposer une version sur support numérique des dossiers de candidature n'était pas une formalité inutile, en raison notamment de ce qu'elle avait pour objet de permettre l'analyse des candidatures déposées dans des délais contraints. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, les candidats à l'attribution d'un contrat de concession doivent respecter les exigences imposées par le règlement de la consultation et ne peuvent être exonérés de cette obligation que dans l'hypothèse où l'une de ces exigences serait manifestement dépourvue de toute utilité pour l'examen des candidatures ou des offres. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que le juge des référés a estimé que l'absence de version sous format dématérialisé du dossier de candidature de la société Corsica Ferries avait pour effet de rendre cette candidature incomplète au sens de l'article 23 du décret du 1er février 2016 précité, alors même qu'une version sous format papier comportant les pièces et informations demandées avait été également déposée.
5. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales : " Une commission ouvre les plis contenant les candidatures ou les offres et dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières, de leur respect de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés prévue aux articles L. 5212-1 à L. 5212-4 du code du travail et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public (...). "
6. Il résulte des énonciations de l'ordonnance attaquée que la commission de délégation de service public a cru à tort, lors de l'ouverture du dossier de candidature de la société Corsica Ferries, que celui-ci contenait un disque dur externe, et que ce n'est que dans un second temps que le service d'assistance à maîtrise d'ouvrage s'est aperçu qu'il ne s'agissait que d'un lecteur de CD-Rom vide. Après avoir souverainement estimé que le dossier était effectivement incomplet dès l'ouverture des dossiers de candidature, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia n'a pas commis d'erreur de droit en relevant qu'il appartenait, dans ces conditions, à la commission de délégation de service public, compte tenu des compétences qu'elle tient de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales, de rejeter comme incomplète la candidature de la société Corsica Ferries.
7. En dernier lieu, la circonstance que la commission de délégation de service public n'ait été composée, lors de sa réunion, que de membres titulaires ou suppléants issus de la majorité n'implique pas, par elle-même, que cette composition ait été irrégulière. En écartant le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission, qui ne reposait que sur cette seule circonstance, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia, qui a au demeurant relevé que les deux membres suppléants ayant siégé au sein de la commission de délégation de service public avaient bien remplacé les deux membres titulaires absents dont ils étaient les suppléants, n'a pas entaché son ordonnance d'erreur de droit.
8. Il résulte de ce qui précède que la société Corsica Ferries n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu'il soit fait droit à ses conclusions présentées au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, au titre des mêmes dispositions, de mettre à sa charge le versement d'une somme de 4 000 euros à la collectivité de Corse.
[…]
MAJ 30/05/19 - Source legifrance
Textes
Ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession - NOR: EINM1527673R.
Décret n° 2016-86 du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession - NOR: EINM1527677D.
Jurisprudence
CE, 22 décembre 2008, n° 314244, Ville de Marseille / France Télécom - Mentionné dans les tables du recueil Lebon (L'entité adjudicatrice peut s'affranchir des exigences du règlement de la consultation quand la fourniture des éléments demandés ne présente pas d'utilité pour l'appréciation de l'offre notamment parce que ces informations ont un caractère public. L'utilité d'une information au regard de l'appréciation des offres relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.).
CE, 10 mai 2006, n° 286644, SYNDICAT INTERCOMMUNAL DES SERVICES DE L'AGGLOMERATION VALENTINOISE (Possibilité d'exigence de fourniture des formulaires DC4 et DC5 par l'acheteur public).
CE, 23 novembre 2005, n° 267494, Société Axialogic (le règlement de la consultation d'un marché est obligatoire dans toutes ses mentions).
Actualités
Formulaire DC1 incomplet et non signé, bien qu’exigé au RC, entrainant l’irrégularité de la candidature et la résiliation du contrat (CE, 28 mars 2022, n° 454341, Commune de Ramatuelle). - 5 avril 2022.
Formulaire DC1 partiellement renseigné et non signé rendant l’offre irrégulière dans un contrat de concession. Résiliation du contrat avec un effet différé. - 30 juillet 2021.
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