Conseil d’Etat, 10 juin 2020, n° 431194, Ministère de la défense - Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Il résulte du I de l'article 53 du code des marchés publics (repris à l'article L2152-7 du code de la commande publique) qu'il appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d'apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins. Ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, être définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée et ne pas créer de rupture d'égalité entre les candidats. Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse. Le Conseil d'Etat juge admet un critère valeur technique pondéré à 90 % et un critère de prix pondéré à 10 %. [Annule l'arrêt de la CAA Nantes, 29 mars 2019, n° 17NT01869]
Résumé
Il s'agissait d'un marché à bons de commande, passé selon la procédure adaptée, pour des prestations de formation "achats publics". Suite au rejet des offres d'un groupement le tribunal administratif a rejeté les demandes de ces sociétés condamnant l'Etat au versement d'une réparation du préjudice causé par l'éviction de ce marché. La cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement (CAA Nantes, 29 mars 2019, n° 17NT01869), et la ministre des armées se pourvoit en cassation contre cet arrêt.
Le Conseil d'Etat rappelle d'abord les règles de réparation du préjudice né de l'éviction irrégulière d'une entreprise candidate à l’attribution d’un marché public (CE, 18 juin 2003, n° 249630, Groupement d'entreprises solidaires ETPO Guadeloupe, Société Biwater et Société Aqua TP).
Ensuite il rappelle rappelle que l'acheteur doit choisir offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution et définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée. Ceci résulte du I de l'article 53 du code des marchés publics (repris à l'article L2152-7 du code de la commande publique) disposant qu'il "appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d'apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins. Ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, être définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée et ne pas créer de rupture d'égalité entre les candidats. Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse".
En ce qui concerne le choix et la pondération des critères (CE, 28 avril 2006, 280197, Commune de Toulouse (Le prix ne peut être le seul critère d'attribution d'un marché. D'autre part, un critère, s'il peut être retenu eu égard à l'objet du marché, s'il occupe une place prépondérante, doit être explicité au niveau des attentes de la personne publique).
Un arrêt de la CJCE indiquait aussi que " ... les pouvoirs adjudicateurs sont libres non seulement de choisir les critères d'attribution du marché mais également de déterminer la pondération de ceux-ci, pour autant qu'elle permette une évaluation synthétique des critères retenus afin d'identifier l'offre économiquement la plus avantageuse." (CJCE, 4 décembre 2003, ENV AG et Wienstrom GmbH contre Républik Osterreich, Aff. C-448/01).
Dans le cas d'espèce, alors même que le marché passé en procédure adaptée n'était soumis qu'à obligation de hiérarchisation des critères d'attribution, l'acheteur avait procédé à la pondération des critères. Le règlement de la consultation prévoyait un critère de valeur technique pondéré à 90 % et d'un critère de prix pondéré à 10 %.
L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes avait jugé qu'une telle pondération était irrégulière car "particulièrement disproportionnée", et que le ministre de la défense n'en établissait pas la nécessité et qu'elle conduisait à "neutraliser manifestement" le critère du prix.
Le Conseil d'Etat juge annule l'arrêt de la CAA Nantes, 29 mars 2019, n° 17NT01869 pour erreur de droit, admettant ainsi le niveau de pondération retenu ici par l'acheteur.
Texte
MAJ 20/06/20 - Source legifrance
Jurisprudence
CAA Nantes, 29 mars 2019, n° 17NT01869, Société Erics Associés et société Altaris c/ Ministère de la défense (Pondération des critères disproportionnée. Un critère technique de 90 % de la note neutralise un critère financier de 10 % s’il n’est pas nécessaire au regard de l’objet du marché. Une telle pondération des critères est de nature à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Méconnaissance des règles de la concurrence et le principe d’égalité entre les candidats. Marché de prestations de formation professionnelle).
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