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jurisprudence TA de LYON, 7 avril 2008, n° 0801795

TA de LYON, 7 avril 2008, n° 0801795 , Société Groupe PIZZORNO ENVIRONNEMENT

Le ministère de la défense avait passé un appel d’offres restreint pour le choix d'une entreprise chargée d'effectuer de nombreux services différents pour le camp militaire de Canjuers dans le Var sans allotir ces prestations. Le juge administratif a annulé la procédure de passation du marché.

 

Le recours à l'allotissement doit pouvoir être justifié par rapport aux conditions posées par l'article 10 du CMP 2006

Lorsque l’objet du marché permet l’identification de prestations distinctes,  le pouvoir adjudicateur ne peut légalement opter pour  la dévolution sous forme de marché global que s’il justifie remplir au moins une des trois conditions dérogatoires qui sont mentionnées à l'article 10 du code des marchés publics 2006, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Le pouvoir adjudicateur était par conséquent tenu d'allotir les prestations.

 

Les mentions de l'avis d’appel public à la concurrence

AAPC et renvoi au règlement de la consultation

Un avis d'appel public à la concurrence ne peut se borner, en ce qui concerne les critères de sélection des candidatures, à citer la capacité économique et financière et la capacité technique à renvoyer pour le détail au règlement de la consultation.

En effet, un tel renvoi, alors notamment que le règlement de la consultation ne fait pas l’objet des mêmes mesures de publicité que l’avis d’appel public à la concurrence et n’a vocation à être remis qu’aux entreprises qui manifestent leur intérêt pour le marché en cause auprès du pouvoir adjudicateur est incompatible avec les obligations de publicité incombant à ce dernier en vertu des dispositions de l’article 45 du code des marchés publics et du règlement CE du 7 septembre 2005 ;

 

Rubrique II.2.1 «quantité ou étendue globale du marché» de l’avis de publicité publié au JOUE

Pour les marchés communautaires, les AAPC doivent être établis pour la publication au Journal officiel de l’Union européenne conformément au modèle fixé par le règlement (CE) n° 1564/2005. La rubrique II.2.1 « Quantité ou étendue globale du marché» de l’avis de publicité publié au JOUE qui n’est pas remplie, prive les candidats de la possibilité d’avoir une idée suffisante des besoins à satisfaire et de l’ampleur des prestations à fournir. Cette insuffisance constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence qui incombent au pouvoir adjudicateur et entache d’illégalité la procédure de passation.

 

Critères de sélection des candidatures : Exigence d’autorisations administratives au stade de la candidature

Critères de sélection des candidatures : Ni l’article 45 du code des marchés publics ni l’arrêté du 28 août 2006 pris pour son application n’autorisent l’acheteur public, quand bien même l’exécution du marché suppose l’obtention d’autorisations administratives, à exiger des entreprises concernées qu’elles attestent dès le stade de la candidature qu’elles possèdent les autorisations requises ou qu’elles ont reçu récépissé d’une demande

Cette analyse est conforme à l'arrêt CE, 21 novembre 2007, n° 291411, Département de l’Orne.

Le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT demande au tribunal, en application des dispositions de l’article L551-1 du code de justice administrative :

- d’enjoindre au ministre de la défense de différer la signature du contrat multiservice et facility management au profit du camp de Canjuers (83), ayant fait l’objet d’un avis d’appel public à la concurrence publié au JOUE le 17 juillet 2008 et au BOAMP le 13 juillet 2007, pour une durée maximum de 20 jours,

- d’annuler l’ensemble de la  procédure de passation du marché litigieux,

- de condamner le ministre de la défense à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le marché portait sur 11 prestations totalement distinctes et devait être alloti en application de l’article 10 du code des marchés publics ; que le ministre de la défense a limité à 5 le nombre de candidats autorisés à présenter une offre, se réservant ainsi la possibilité d’inviter moins de 5 candidats à déposer une offre, en contradiction avec l’article 60 du code des marchés publics ; qu’en renvoyant les candidats au règlement de consultation pour connaître les documents et renseignements à fournir, le ministre de la défense a commis un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ; que l’avis publié au BOAMP ne mentionne pas la date de son envoi au JOUE ; que les avis de marché publiés ne contiennent aucune information au titre de la rubrique II.2.1 «quantité ou étendue globale» du marché.

 

Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2008, le ministre de la défense  conclut au rejet de la requête.

Il soutient

- que le choix du recours à un marché global était justifié et légal dès lors que la dévolution en lots séparés risquait de rendre techniquement difficile et financièrement coûteuse l’exécution des prestations ; que l’économie réalisée grâce à ce recours s’élève à au moins 100 000 euros ;

- que la procédure choisie a permis d’appliquer l’ensemble des principes fondamentaux de l’achat public ;

- que plusieurs marchés de ce type ont été passés en région parisienne ;

- que dès lors que l’article 60-1 du code des marchés publics dispose que le nombre minimum de candidats admis à présenter une offre ne peut être inférieur à cinq, on ne peut déduire de l’absence de nombre minimum dans l’avis d’appel public à la concurrence que le pouvoir adjudicataire se réservait la possibilité de limiter le nombre de candidature à un nombre inférieur à cinq ;

- qu’il ressort des dispositions combinées des articles 45 et 52 du code des marchés publics que le pouvoir adjudicateur ne doit mentionner des niveaux de capacités dans l’avis d’appel public à la concurrence que lorsqu’il a décidé de les exiger pour les candidats ;

- que le règlement de consultation ne prévoit pas de niveaux minimaux de capacité ;

- que l’indication de la date d’envoi au JOUE est superfétatoire dès lors que le pouvoir adjudicateur a choisi de procéder à l’envoi d’un avis unique transmis automatiquement et simultanément par le biais de la « passerelle unique » mise en place entre le BOAMP et le JOUE ;

- que cette omission n’est pas considérée comme un manquement substantiel aux obligations de publicité ni comme portant atteinte au principe de mise en concurrence ;

- que la rubrique relative à la quantité et à l’étendue globale du marché n’est pas une rubrique obligatoire.

 

Par un mémoire en réplique, enregistré le 2 avril 2008, le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT conclut aux mêmes fins que la requête ; il soutient en outre

- que le ministre de la défense ne justifie pas que le marché entrait dans l’une des dérogations à l’allotissement prévues par l’article 10 du code des marchés publics ;

- que les mentions relatives à la quantité et à l’étendue globale du marché sont bien obligatoires ;

- qu’en exigeant des candidats qu’ils fournissent une autorisation d’activité de transports de personnels et une autorisation préfectorale pour la collecte des ordures ménagères et enlèvement des déchets toxiques et gras, le ministre de la défense a méconnu l’arrêté du 28 août 2006 pris pour l’application de l’article 45 du code des marchés publics ;

- que l’administration ne pouvait se fonder sur l’évolution de son chiffre d’affaires pour apprécier sa capacité financière.

 

Par un mémoire enregistré le 2 avril 2008, le ministre de la défense conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

 

Après avoir examiné la requête, l’ordonnance en date du 19 mars 2008 enjoignant au ministre de la défense de différer la signature du marché, ainsi que les mémoires et les pièces produits par les parties, et vu :

- le code des marchés publics,

- le code de justice administrative, et notamment son article L551-1 ;

 

Considérant

- que le ministre de la défense a, par un avis d’appel public à la concurrence publié au JOUE le 17 juillet 2008 et au BOAMP le 13 juillet 2007, lancé une procédure d’appel d’offres restreint en vue de la passation d’un marché public  «multiservices et facility management» au profit du camp de Canjuers ;

- que le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT, mandataire d’un groupement solidaire d’entreprises, a été admis à présenter une offre au terme de la procédure de sélection des candidatures ;

- que, toutefois, son offre a été rejetée au profit de celle de la société Elyo-Suez Energie Services ;

- que le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT demande l’annulation de cette procédure ;

 

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L551-1 du code de justice administrative : "Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics, des marchés mentionnés au 2º de l'article 24 de l'ordonnance nº2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, des contrats de partenariat, des contrats visés au premier alinéa de l'article L6148-5 du code de la santé publique et des conventions de délégation de service public. Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement, ainsi que le représentant de l'Etat dans le département dans le cas où le contrat est conclu ou doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local. Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu'il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours. Sauf si la demande porte sur des marchés ou contrats passés par l'Etat, elle peut également être présentée par celui-ci lorsque la Commission des communautés européennes lui a notifié les raisons pour lesquelles elle estime qu'une violation claire et manifeste des obligations de publicité et de mise en concurrence d'origine communautaire ou résultant de l'accord sur l'Espace économique européen, a été commise. Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés." ;

 

En ce qui concerne le moyen tiré du manquement au principe d’allotissement :

Considérant qu’aux termes de l’article 10 du code des marchés publics : "Afin de susciter la plus large concurrence et sauf si l’objet du marché ne permet pas l’identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés dans les conditions prévues par le III de l’article 27. A cette fin, il choisit librement le nombre de lots, en tenant notamment compte des caractéristiques techniques des prestations demandées, de la structure du secteur économique en cause et, le cas échéant, des règles applicables à certaines professions. Les candidatures et les offres sont examinées lot par lot. Le pouvoir adjudicateur peut toutefois passer un marché global, avec ou sans identification de prestations distinctes, s’il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu’elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l’exécution des prestations ou encore qu’il n’est pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination." ; qu’il résulte de ces dispositions que, lorsque l’objet du marché permet l’identification de prestations distinctes,  le pouvoir adjudicateur ne peut légalement opter pour  la dévolution sous forme de marché global que s’il justifie remplir au moins une des trois conditions dérogatoires qui y sont mentionnées ;

Considérant

- qu’il résulte de l’instruction que le marché comprend l’exploitation et l’entretien des installations thermiques et multi-techniques du camp, le transport du personnel, la collecte, l’enlèvement et le traitement des ordures ménagères et déchets spécifiques, le nettoyage des locaux et la plonge, la fourniture de gaz liquide avec mise à disposition des cuves et leur entretien, l’entretien des espaces verts, les contrôles et vérifications réglementaires, l’entretien des ascenseurs et monte charge, des alarmes incendie et anti-intrusion et des portes coupe-feu, la lutte antiparasitaire, la fourniture de bonbonnes de gaz industriel et la prestation de «facility management» ;

- que si le ministre de la défense ne conteste pas que l’objet du marché permet d’identifier des prestations différentes, il soutient que le recours à un marché global était autorisé dès lors que la passation de nombreux petits marchés aurait abouti à un coût total supérieur à celui du marché global, qu’il n’était pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation de pilotage et de coordination et que la dévolution en lots séparés était de nature à restreindre la concurrence ;

Considérant

- qu’à supposer même que la globalisation du marché permette au pouvoir adjudicateur de réaliser des économies d’échelle par rapport à des marchés allotis, ce qui ne ressort pas des pièces du dossier mais a été estimé à 3 % au cours de l’audience, il ne résulte pas pour autant de l’instruction que la dévolution en lots séparés de prestations extrêmement diverses et sans particularité notable serait, dans les circonstances de l’espèce, de nature à rendre financièrement coûteuse l’exécution de ces prestations ;

- qu’il ne résulte pas plus de l’instruction que le ministre de la défense ne serait pas ou ne serait plus, à bref délai, en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination, missions actuellement assurées par du personnel civil et militaire ;

- que la circonstance qu’une partie de ce personnel pourrait être supprimé par la suite du fait de l’existence d’un marché global n’est pas de nature, par elle-même, à faire regarder comme remplie la condition précitée ;

- que le moyen tiré de ce que la dévolution en lots séparés serait de nature à restreindre la concurrence n’est assorti d’aucune précision ni justificatif ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, pour louable que soit l’objectif de rationalisation mis en avant par l’administration, le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT est fondé à soutenir que le ministre de la défense a méconnu le principe d’allotissement énoncé à l’article 10 du code des marchés publics ;

 

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l’article 60 du code des marchés publics :

Considérant qu’aux termes de l’article 60 du code des marchés publics : "Le pouvoir adjudicateur peut décider de limiter le nombre de candidats qui seront admis à présenter une offre. Il mentionne cette décision dans l’avis d’appel public à la concurrence. Il fixe dans cet avis un nombre minimum de candidats admis à présenter une offre et peut également fixer un nombre maximum. Ce nombre minimum ne peut être inférieur à cinq." ;

Considérant

- qu’il résulte de l’instruction que  le ministre de la défense a précisé dans la rubrique «autres informations» de l’avis d’appel public à la concurrence que le nombre de candidats autorisés à présenter une offre serait limité à cinq ;

- qu’en fixant à cinq le nombre maximum de candidats admis à présenter une offre, le ministre de la défense n’a pas pour autant entendu fixer un nombre minimum de candidats à un chiffre inférieur à cinq, ce qu’il n’aurait légalement pu faire, compte tenu des dispositions précitées de l’article 60 du code des marchés publics, et comme il ressort du point 6-2-4° du règlement de consultation  : "Les candidats seront classés en fonction du nombre de points obtenus et ceux ayant obtenu les cinq meilleures notes seront retenus." ;

 

En ce qui concerne les moyens tirés du caractère incomplet des avis d’appel public à la concurrence :

Considérant en premier lieu

- qu’il résulte de l’instruction que les avis d’appel public à la concurrence publiés tant au JOUE qu’au BOAMP se bornent , en ce qui concerne les critères de sélection des candidatures, à citer la capacité économique et financière et la capacité technique et à renvoyer pour le détail au règlement de la consultation ;

- qu’un tel renvoi, alors notamment que le règlement de la consultation ne fait pas l’objet des mêmes mesures de publicité que l’avis d’appel public à la concurrence et n’a vocation à être remis qu’aux entreprises qui manifestent leur intérêt pour le marché en cause auprès du pouvoir adjudicateur est incompatible avec les obligations de publicité incombant à ce dernier en vertu des dispositions de l’article 45 du code des marchés publics et du règlement CE du 7 septembre 2005 ;

Considérant en deuxième lieu

- qu’aux termes de l’article 40 VIII du code des marchés publics : "La publication des avis dans le Bulletin officiel des annonces des marchés publics ou sur tout autre support publicitaire ne peut intervenir avant l’envoi à l’Office des publications officielles de l’Union européenne. Ces avis ne peuvent fournir plus de renseignements que ceux qui sont contenus dans les avis adressés à l’Office précité ou publiés sur un profil d’acheteur. Ils mentionnent la date d’envoi de l’avis à cet office." ;

- qu’il résulte de ces dispositions que l’avis publié au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) doit indiquer la date d’envoi de l’avis en vue de sa publication au journal officiel de l’union européenne (JOUE) ;

- qu’il est constant que l’avis d’appel public à la concurrence publié au BOAMP ne mentionne pas, contrairement à ce qu’exigent expressément les dispositions précitées de l’article 40 du code des marchés publics, la date d’envoi de l’avis à l’Office des publications officielles de l’Union européenne ; que cette mention, outre le fait qu’elle permet aux candidats de vérifier que l’envoi à la publication au niveau national n’est pas intervenu avant celui prévu au niveau communautaire, permet également l’information des candidats quant à l’existence de cette seconde formalité et à son accomplissement correct du point de vue de la chronologie à respecter ;

- qu’en l’espèce, il n’est d’ailleurs pas indiqué dans les avis publiés que le ministre de la défense a choisi de recourir à un envoi sous forme électronique ;

- que la circonstance que l’utilisation du modèle d’avis électronique a pour conséquence d’adresser simultanément les avis aux différents organes chargés de leur publication est sans incidence sur l’obligation de renseigner les candidats sur la date d’accomplissement de l’envoi de l’avis pour publication au JOUE, lorsque, comme en l’espèce, elle s’impose, au besoin en indiquant cette date, notamment, dans la rubrique «autres informations» ;

- que l’omission de cette formalité, qui s’imposait à l’administration du seul fait de la disposition précitée de l’article 40 du code des marchés publics, présente un caractère substantiel et est de nature à entacher d’irrégularité la procédure de publicité ;

Considérant en troisième lieu,

- qu’aux termes du V de l’article 40 du code des marchés publics : "Les avis d’appel public à la concurrence mentionnés au 2° du III et au 2° du Iv sont établis pour la publication au Journal officiel de l’Union européenne conformément au modèle fixé par le règlement CE n° 1564/2005 susmentionné" ;

- qu’il est constant que la rubrique II.2.1 «quantité ou étendue globale du marché» de l’avis de publicité publié au JOUE n’a pas été remplie, privant ainsi les candidats de la possibilité d’avoir une idée suffisante des besoins à satisfaire et de l’ampleur des prestations à fournir ;

- que cette insuffisance constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence qui incombaient au ministre de la défense et entache d’illégalité la procédure de passation ;

 

En ce qui concerne le moyen tiré de l’irrégularité des justificatifs demandés :

Considérant qu’aux termes de l’article 45 du code des marchés publics : "A l’appui des candidatures, il ne peut être exigé que : 1° Des renseignements permettant d’évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières du candidat. La liste de ces renseignements et documents est fixée par arrêté du ministre chargé de l’économie." ; qu’aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 28 août 2006 pris en application de ces dispositions : "A l’appui des candidatures et dans la mesure où ils sont nécessaires à l’appréciation des capacités des candidats, le pouvoir adjudicateur ne peut demander, en application de l’article 45 du code des marchés publics ou de l’article 17 du décret du 30 décembre 2005 que le ou les renseignements suivants :  Déclaration indiquant l’outillage, le matériel et l’équipement technique dont le prestataire ou l’entrepreneur dispose pour l’exécution des services ou de l’ouvrage et déclaration mentionnant les techniciens ou les organismes techniques dont l’entrepreneur disposera pour l’exécution de l’ouvrage " ;

Considérant qu’aucune des dispositions de l’article 45 du code des marchés publics ou de l’arrêté du 28 août 2006 pris pour son application n’autorisent l’acheteur public, quand bien même l’exécution du marché suppose comme en l’espèce l’obtention d’autorisations administratives, à exiger des entreprises concernées qu’elles attestent dès le stade de la candidature qu’elles possèdent les autorisations requises ou qu’elles ont reçu récépissé d’une demande ;

Considérant

- que l’article 5-2 «contenu des dossiers de candidature» du règlement de consultation exigeait la production d’une autorisation d’activité de transport de personnel et d’une autorisation préfectorale de collecte des ordures ménagères et d’enlèvement des déchets toxiques et gras, datant toutes deux de moins de cinq ans ;

- qu’aux termes de l’article 6-2 de ce même document, l’absence de l’une de ces pièces dans la première enveloppe entraîne une note éliminatoire de zéro ;

- qu’il n’y a pas lieu de s’interroger sur le point de savoir si l’atteinte portée au principe d'égalité d’accès à la commande publique n’était pas objectivement rendue nécessaire par l’objet du marché et la nature des prestations à réaliser dès lors que cette atteinte trouvait son origine dans la violation des règles de droit applicables ;

- qu’est de même sans incidence la circonstance qu’aucun candidat n’a été éliminé pour ce motif ; que le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT est, dès lors, fondé à soutenir que le ministre de la défense a de ce fait méconnu les obligations de mise en concurrence qui s’imposaient à lui ;

Considérant qu’aux termes de l’article 52 du code des marchés publics : "L’absence de référence relatives à l’exécution de marchés de même nature ne peut justifier l’élimination d’un candidat et ne dispense pas le pouvoir adjudicateur d’examiner les capacités professionnelles, techniques et financières des candidats." ;

Considérant

- qu’aux termes du 6) du point 5-2 «contenu des dossiers de candidatures», les candidats devaient fournir la liste de leurs références professionnelles entrant dans l’objet du marché en indiquant le nom de l’entreprise ayant réalisé la prestation, la nature des prestations, les noms des sociétés et/ou administrations concernées, le montant des prestations et l’année de réalisation ;

- qu’aux termes du point 6-2 2° du même document, ce critère devait être appliqué de la façon suivante : pas de références ou références sans rapport avec l’objet du marché = 0 point et qu’aux termes du point 6-2-4° déjà cité : "Les candidats seront classés en fonction du nombre de points obtenus et ceux ayant obtenu les cinq meilleures notes seront retenus" ;

- qu’ainsi, en exigeant seulement des références professionnelles entrant dans l’objet du marché, sans autoriser la production d’autres références, et en prévoyant des critères de sélection conduisant à l’élimination de tout candidat ne justifiant pas de telles références, le ministre de la défense a méconnu les dispositions précitées de l’article 52 du code des marchés publics ;

- que, pour les mêmes raisons, le ministre de la défense ne pouvait fixer, comme critère d’appréciation des capacités financières des candidats, à la seule évolution du chiffre d’affaires consacré au «facility management» entre l’année N-2 et l’année N ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT est fondé à demander l’annulation de la procédure de passation du marché litigieux ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant qu'aux termes de l'article L761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation." ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat à verser au GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT une somme de 800 euros sur le fondement des dispositions précitées de l’article L761-1 du code de justice administrative ;

 

Le juge des référés ordonne :

Article 1er : La procédure de passation du contrat multiservice et facility management au profit du camp de Canjuers (83) est annulée.

Article 2 : Le ministre de la défense est invité, s’il entend poursuivre son projet, à reprendre la procédure au stade initial de la mise en concurrence des entreprises.

Article 3 : L’Etat est condamné à verser 800 euros (huit cents euros) au GROUPE PIZZORNO ENVIRONNEMENT en application de l'article L761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée conformément aux dispositions de l’article R522-12 du code de justice administrative.

Jurisprudence

TA de PARIS, n°0817554, 24 novembre 2008, Société PROTIM (Allotissement et mode de dévolution. Pour la passation d'un marché global, le pouvoir adjutateur doit pouvoir justifier du recours à ce mode de dévolution au regard d'une des trois conditions posées par l'article 10 du code des marchés publics 2006)

TA de LYON, 7 avril 2008, n° 0801795 , Société Groupe PIZZORNO ENVIRONNEMENT (Conditions de recours à l'allotissement. Avis d'appel public à la concurrence et renvoi au règlement de la consultation. La rubrique II.2.1 «quantité ou étendue globale du marché» de l’avis de publicité publié au JOUE doit être remplie. Critères de sélection des candidatures : Exigence d’autorisations administratives au stade de la candidature)

CE, 10 mai 2006, n°288435, Société Schiocchet (Conditions de recours au marché à bons de commande et allotissement)

Les "lots techniques" (CE du 30 juin 2004, Sogea Atlantique et Entreprise des Travaux Publics de l'Ouest (ETPO) / OPHLM NANTES-HABITAT, req. n° 261472 - Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si la candidature des groupements d'entreprises à forme conjointe suppose, en vertu du I de l'article 51 du code des marchés publics, que le maître d'ouvrage ait décomposé le marché en plusieurs ensembles de prestations techniques susceptibles, chacun, d'être attribué à un membre du groupement, cette décomposition en lots techniques, - qui est une opération différente de celle de l'allotissement prévu à l'article 10 précité du même code, lequel consiste à conclure plusieurs marchés séparés- ne fait pas obstacle à la conclusion d'un marché unique ; qu'ainsi, en se fondant sur la circonstance que le marché litigieux avait le caractère d'un marché unique pour juger que la collectivité publique ne pouvait pas réserver ce marché aux groupements conjoints, le premier juge a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; "

CAA Nantes, n°99NT02378, 3 octobre 2003, Préfet d'Eure-et-Loir (la personne publique ne peut déclarer infructueux un appel d’offres portant sur chacun des lots ayant fait l’objet d’une mise en concurrence, pour le seul motif que certaines des offres portant sur certains des lots seulement seraient irrecevables au sens des dispositions de l’article 297-I du code des marchés publics alors en vigueur; qu’en pareille hypothèse, il appartient seulement à la collectivité de se prononcer lot par lot et d’attribuer les lots selon les modalités décrites par les dispositions précitées du code des marchés publics et, le cas échéant, de déclarer infructueux les seuls lots n’ayant pu faire l’objet d’une attribution)

TA de Lyon, 28 mars 2002, préfet du Rhône, n° 0003503 (Est entaché d'illégalité  le règlement de consultation des entreprises, qui, dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres, limite le droit de soumissionner des entreprises, sanctionné par l'exclusion du marché dès l'ouverture de la première enveloppe, et qui a, de ce fait, pour effet d'instituer une règle de recevabilité des candidatures non prévue par le code des marchés publics [alors en vigueur, et antérieur à celui de 2001], alors même que cette collectivité dispose de la faculté d'édicter des règles particulières de dévolution des lots examinés par la commission d'appel d'offres au stade de l'examen de la seconde enveloppe)
http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/Visu?cid=156495&indice=1&table=JADE&ligneDeb=1

TA de Lyon, 13 décembre 2001, préfet de la région Rhône-Alpes, n° 0002552. On ne peut dans l'AAPC limiter à deux le nombre de marchés pouvant être attribués à un même candidat (égal accès aux marchés publics et principe de la libre concurrence issu de l'ordonnance du 1er décembre 1986 « considérant que l'attribution d'un marché doit respecter, tant les exigences de l'égal accès aux marchés publics, que le principe de libre concurrence, qui découle notamment de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ... ».
http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/Visu?cid=156487&indice=1&table=JADE&ligneDeb=1