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Dans cette affaire, une entreprise avait soumissionné à un marché, et l'acheteur l'avait informée que son offre pourrait être considérée comme anormalement basse. En réponse, l'entreprise avait expliqué par courrier que la différence significative de prix s'expliquait par des frais d'importation non inclus dans son offre. L'acheteur public lui avait alors demandé de rectifier cette omission pour se conformer au Cahier des Clauses Administratives Particulières (CCAP). En réponse à cette demande, l'entreprise avait soumis un nouvel acte d'engagement, augmentant son offre de 390 750 euros à 477 540 euros.
Texte
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Considérant ce qui suit :
1. Par avis en date du 18 octobre 2023, le Grand Port Maritime de Guadeloupe a engagé une consultation, sous la forme d'un appel d'offre ouvert, pour l'attribution d'un marché de fourniture relatif aux travaux d'extension du quai 12, divisé en 3 lots, dont un lot n°3 dénommé " Fourniture des équipements ". Par courrier en date du 23 janvier 2024, la société requérante Equip Travaux Hydrauliques Maritimes a été informée du rejet de son offre comme étant irrégulière. La société requérante demande au juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 551-5 du code de justice administrative d'annuler la décision de rejet de son offre, ainsi que toutes les décisions se rapportant à la passation du marché public relatif au lot n° 3, et d'enjoindre au Grand Port Maritime de Guadeloupe de suspendre l'exécution de toute décision se rapportant à la passation du marché public en son lot n° 3 et de réexaminer sa candidature.
En ce qui concerne le caractère irrégulier de l'offre de la société requérante :
6. Aux termes de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. ". Aux termes de l'article L. 2152-2 du même code : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale ". Aux termes de l'article R. 2152-2 du code de la commande publique : " Dans toutes les procédures, l'acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu'elles ne soient pas anormalement basses. / La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet d'en modifier des caractéristiques substantielles ". Enfin, aux termes de l'article R. 2161-5 du code de la commande publique : " L'acheteur ne peut négocier avec les soumissionnaires. Il lui est seulement possible de leur demander de préciser la teneur de leur offre ".
7. Aux termes des stipulations de l'article 5.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Conformément à l'article 10.1.3. du CCAG Fournitures et Services, les prix sont réputés comprendre toutes les charges fiscales ou autres frappant obligatoirement les prestations, les frais afférents au conditionnement, au stockage, à l'emballage, à l'assurance et au transport jusqu'au lieu de livraison, ainsi que toutes les autres dépenses nécessaires à l'exécution des prestations, les marges pour risque et les marges bénéficiaires. / Les frais de manutention et de transport, qui naîtraient de l'ajournement ou du rejet des prestations, sont à la charge du titulaire. / Les prix du contrat comprennent : les dépenses nécessaires à l'exécution des prestations prévues au contrat ; les charges fiscales et autres charges éventuelles qui frappent les prestations ; les frais éventuels de conditionnement, stockage, emballage, assurance et transport ; les marges pour risque et les marges bénéficiaires ".
8. L'acheteur public ne peut attribuer un marché à un candidat qui ne respecterait pas une des prescriptions imposées par le règlement de la consultation. Il est tenu d'éliminer, sans en apprécier la valeur, les offres incomplètes, c'est-à-dire celles qui ne comportent pas toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation et sont, pour ce motif, irrégulières. Si, dans les procédures d'appel d'offre, l'acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires dont l'offre est irrégulière à la régulariser, dès lors qu'elle n'est pas anormalement basse et que la régularisation n'a pas pour effet d'en modifier des caractéristiques substantielles, il ne s'agit toutefois que d'une simple faculté qui lui est offerte, non d'une obligation. En outre, si les dispositions de l'article R. 2161-5 du code de la commande publique s'opposent en principe à toute modification du montant de l'offre à l'initiative du candidat ou du pouvoir adjudicateur, ce principe ne saurait recevoir application dans le cas exceptionnel où il s'agit de rectifier une erreur purement matérielle, d'une nature telle que nul ne pourrait s'en prévaloir de bonne foi dans l'hypothèse où le candidat verrait son offre retenue.
9. Le juge des référés précontractuels peut substituer au motif retenu par l'acheteur public dans le document informant le candidat du rejet de son offre, un autre motif de droit ou de fait, à condition que cette substitution ait été demandée par l'autorité administrative lors de l'instruction de l'affaire et que le requérant n'ait été privé d'aucune garantie de procédure.
10. Il résulte de l'instruction que, par courrier en date du 23 janvier 2024, l'acheteur public a fondé le caractère irrégulier de l'offre de la société requérante sur l'omission des frais afférents au transport dans son offre initiale ainsi que l'absence de régularisation de l'offre dès lors que le nouveau détail quantitatif estimatif ne permettait pas de relier les prix de l'offre initiale aux détails des frais afférents au transport en l'absence de formule de calcul. Toutefois, dans le cadre de la présente instance, le Grand Port Maritime fait valoir que, dès lors que la régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet d'en modifier des caractéristiques substantielles, la modification substantielle du prix de l'offre de la requérante, qui ne saurait être considérée comme la correction d'une erreur matérielle, faisait obstacle à la régularisation de l'offre.
11. Il résulte de l'instruction que la société requérante a remis le 17 novembre 2023 une offre pour le lot n°3 " Fourniture des équipements ". Par courrier en date du 24 novembre 2023, le Grand Port Maritime de Guadeloupe a informé la société requérante que son offre était susceptible d'être qualifiée d'anormalement basse. Par courrier en date du 29 novembre 2023, la société requérante a indiqué que cet écart significatif de prix serait dû à des frais d'importation non intégrés dans son offre. Par courrier en date du 6 décembre 2023, l'acheteur public l'a invité à régulariser son offre sur ce point, pour se mettre en conformité avec le cahier des clauses administratives particulières, notamment son article 5.1. En réponse à cette demande, la société requérante a transmis le 12 décembre 2023 un nouvel acte d'engagement, portant son offre de 390 750 euros à 477 540 euros. Cette modification ainsi apportée par la société requérante à son offre initiale a abouti, par son ampleur, à modifier la teneur de son offre, dont le prix global a été augmenté de plus de 22 %. Cette modification substantielle apportée au prix de l'offre de la société postérieurement à la date limite de réception des offres, bien qu'induite par l'acheteur public, ne peut être regardée comme la rectification d'une erreur purement matérielle, aisément décelable par le pouvoir adjudicateur, d'une nature telle que nul n'aurait pu s'en prévaloir de bonne foi dans l'hypothèse où le candidat aurait vu son offre retenue. De plus, si la société requérante fait valoir que le règlement de consultation ne faisait pas état de de l'intégration des frais d'importation dans le calcul des prix, il résulte de l'instruction que d'une part, les dispositions précitées du CCAG indiquaient que le prix de l'offre devait comprendre de tels frais et que, d'autre part, la société requérante a été destinataire, le 10 novembre 2023, d'une réponse à la question d'une autre société candidate, rappelant que la livraison était comprise dans le prix du marché. Par suite, dès lors qu'elle n'intégrait pas ce prix dans son offre initiale et que la régularisation de l'offre n'était pas possible au regard de son impact substantiel sur le prix, l'offre de la société requérante était irrégulière. Il s'ensuit que le Grand Port Maritime de Guadeloupe était tenu d'écarter cette offre de la consultation.
12. Dans ces conditions, dès lors que la société Equip Travaux Hydrauliques Maritimes n'a été privée d'aucune garantie et que le motif tiré de l'irrégularité de l'offre, en ce que son offre initiale n'intégrait pas les frais relatifs au transport jusqu'au lieu de livraison et que la régularisation de l'offre n'était pas possible au regard du caractère substantiel de la modification du prix initial, était susceptible de fonder le rejet de cette offre, il y a lieu de procéder à la substitution de motif demandée par le Grand Port Maritime de Guadeloupe, et de considérer que ce dernier était fondé à rejeter comme irrégulière l'offre de la société requérante.
13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le Grand Port Maritime de Guadeloupe, que l'ensemble des conclusions à fin d'annulation et d'injonction de la société Equip Travaux Hydrauliques Maritimes doivent être rejetées.
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Voir également :
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Textes
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Jurisprudence
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