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Il incombe à l'acheteur public de détecter et de vérifier les offres qui semblent anormalement basses, mais le seul écart de prix entre les offres n'est pas suffisant pour qualifier une offre d'anormalement basse. Dans le cas d'espèce, l’acheteur n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en retenant l'offre, car celle-ci n'a pas été démontrée comme étant manifestement sous-évaluée ou susceptible de compromettre la bonne exécution du marché. La Cour a ainsi rejeté l'appel de la société requérante, confirmant la validité du marché attribué. Certificat ISO 9001 expiré au 8 septembre 2016 entrainant l’irrégularité de l'offre de la société attributaire en l'absence de production d'un certificat valide au moment du dépôt de son offre, selon les premiers juges. Cependant, compte tenu de la faible importance de ce vice et de la remise postérieure d'un certificat valide jusqu'au 22 septembre 2022, cette irrégularité n'était pas de nature à entraîner l'annulation du contrat .
Résumé
La société Texabri a contesté l'attribution d'un marché public par la commune de La Ciotat à la société Feba Construction pour la construction d'un préau dans un groupe scolaire. Texabri, dont l'offre a été classée en deuxième position, a demandé l'annulation du marché, arguant notamment que l'offre retenue était anormalement basse. Le tribunal administratif ayant rejeté sa demande, Texabri a fait appel devant la Cour administrative d'appel.
Le cadre juridique relatif aux offres anormalement basses est défini par le Code de la commande publique. L'article L2152-5 définit une offre anormalement basse comme une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché. L'article L2152-6 impose à l'acheteur public de mettre en œuvre tous les moyens pour détecter les offres anormalement basses et d'exiger des justifications lorsqu'une offre semble anormalement basse. L'article R2152-3 précise les éléments pouvant être pris en considération pour justifier le prix proposé, tels que le mode de fabrication, les solutions techniques adoptées, ou les conditions exceptionnellement favorables dont dispose le soumissionnaire.
La Cour administrative d'appel suit un raisonnement en plusieurs étapes pour déterminer si l'offre retenue était anormalement basse. Premièrement, elle examine l'écart entre l'offre retenue et les autres offres, ainsi que l'estimation initiale du coût par la commune. Deuxièmement, elle considère si des éléments concrets démontrent que le prix proposé est sous-évalué ou compromettrait la bonne exécution du marché. Troisièmement, elle analyse si l'offre retenue est cohérente avec les prestations demandées et les pratiques du secteur. Enfin, elle évalue si la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant cette offre.
Dans le cas présent, la Cour constate que l'offre retenue (25 450 euros HT) était effectivement très inférieure à celle de Texabri (73 208 euros HT), mais également plus proche de l'estimation initiale de la commune (34 000 euros HT). La Cour souligne que le seul écart de prix entre les offres n'est pas suffisant pour qualifier une offre d'anormalement basse. Elle note que Texabri n'a pas apporté d'éléments concrets démontrant que le prix de l'offre retenue était sous-évalué ou compromettrait la bonne exécution du marché. De plus, la Cour relève que les références fournies par Texabri elle-même montrent que ses propres tarifs pour des prestations similaires peuvent varier considérablement, allant de 7 500 à 37 500 euros. Enfin, la Cour constate que l'offre de Texabri était potentiellement surdimensionnée par rapport aux exigences du marché, notamment en termes de résistance au vent.
Texte
[…]
1. Par un avis d'appel public à la concurrence publié le 24 janvier 2020, la commune de La Ciotat a lancé une procédure de mise en concurrence pour l'attribution d'un marché selon une procédure adaptée portant sur la construction d'un préau dans le groupe scolaire Maria-Fabry. Par courrier du 3 juin 2020, la commune de La Ciotat a informé la société Texabri du rejet de son offre, classée en seconde position et de l'attribution du marché à la société Feba Construction. La société Texabri a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à titre principal, à l'annulation de ce marché et à titre subsidiaire, à sa résiliation. Par le jugement du 12 avril 2023, le tribunal administratif a rejeté cette demande. La société Texabri fait appel de ce jugement.
[…]
En ce qui concerne l'existence d'une offre anormalement basse :
8. Aux termes de l'article L. 2152-5 du code de la commande publique : " Une offre anormalement basse est une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché ". Aux termes de l'article L. 2152-6 du même code : " L'acheteur met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. Lorsqu'une offre semble anormalement basse, l'acheteur exige que l'opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre. Si, après vérification des justifications fournies par l'opérateur économique, l'acheteur établit que l'offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". Selon l'article R. 2152-3 de ce même code : " L'acheteur exige que le soumissionnaire justifie le prix ou les coûts proposés dans son offre lorsque celle-ci semble anormalement basse eu égard aux travaux, fournitures ou services, y compris pour la part du marché qu'il envisage de sous-traiter. Peuvent être prises en considération des justifications tenant notamment aux aspects suivants : 1° Le mode de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, le procédé de construction ; 2° Les solutions techniques adoptées ou les conditions exceptionnellement favorables dont dispose le soumissionnaire pour fournir les produits ou les services ou pour exécuter les travaux ; (...). ". Enfin, aux termes de l'article R. 2152-4 de ce code : " L'acheteur rejette l'offre comme anormalement basse (...) Lorsque les éléments fournis par le soumissionnaire ne justifient pas de manière satisfaisante le bas niveau du prix ou des coûts proposés (...) ". Le fait, pour un pouvoir adjudicateur, de retenir une offre anormalement basse porte atteinte à l'égalité entre les candidats dans le cadre de l'attribution d'un marché public. Il résulte des dispositions précitées que, quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe au pouvoir adjudicateur qui constate qu'une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé. Si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l'offre.
9. Il résulte de l'instruction que l'offre retenue par la commune de La Ciotat pour l'attribution du marché portant sur la construction d'un préau dans le groupe scolaire Maria-Fabry s'est élevée à 25 450 euros hors taxes tandis que l'offre de la société Texabri était de 73 208 euros hors taxes. Il résulte par ailleurs de l'instruction que les services techniques de la commune avaient estimé le coût de l'installation à 34 000 euros hors taxes et donc que l'offre de la société attributaire était inférieure, à hauteur de 25 %, à cette estimation, celle de la société appelante lui étant quant à elle plus deux fois supérieure. Contrairement à ce que soutient la société appelante, la seule circonstance que l'offre retenue était près de trois fois inférieure à la sienne n'est pas suffisante pour en déduire que cette offre devait être regardée de ce seul fait comme anormalement basse.
10. La société appelante ne verse aucun élément de nature à établir que le prix de l'offre concurrente serait en lui-même sous-évalué ou compromettrait la bonne exécution du marché. Elle se borne à faire valoir que si le procédé choisi pour la mise en œuvre dans l'offre respectait les prescriptions techniques requises, la société attributaire aurait en réalité mis en place un autre procédé alors qu'une telle allégation n'est pas démontrée.
11. L'instruction ne fait pas davantage ressortir d'éléments de nature à établir que la modicité de l'offre aurait compromis la bonne exécution du marché. En outre, ainsi que le relève la commune en défense, il ressort des références de la société appelante jointes à son offre que le tarif de près de 70 000 euros qu'elle a pu proposer sur d'autres marchés correspond à la fourniture et à l'installation de trois abris ou de deux préaux pour deux collèges tandis que, pour des prestations similaires à celle du présent marché, ses tarifs s'échelonnent entre 7 500 et 37 500 euros. Par ailleurs, la commune verse des éléments de nature à établir que l'offre de l'appelante était surdimensionnée notamment quant à la résistance au vent, puisque le dimensionnement des fondations béton proposé par la société Texabri, de 8 800 Kp, soit une résistance à l'arrachement de 35 200 Kp, était huit fois supérieur au minimum requis de 4 180 Kp. Ainsi, l'offre retenue n'était pas d'un prix manifestement sous-évalué et susceptible ainsi de compromettre la bonne exécution du marché alors qu'est sans incidence sur cette appréciation la question de savoir si la troisième offre qui ne s'élevait qu'à 23 600 euros hors taxes était ou non régulière.
12. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Ciotat n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ni porté atteinte au principe d'égalité dans l'appréciation respective des offres de la société Texabri et de la société attributaire et en retenant l'offre de la société Feba Construction, laquelle ne revêtait pas le caractère d'une offre anormalement basse.
En ce qui concerne l'irrégularité de l'offre retenue :
13. Aux termes de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. ". Aux termes de l'article L. 2152-2 du même code : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. ".
14. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le certificat ISO 9001 du groupe Sioen, fournisseur de la société Feba Construction, que celle-ci avait produit à l'appui de son offre, était expiré au 8 septembre 2016. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, l'offre de la société attributaire en l'absence de production au moment du dépôt de son offre d'un certificat valide devait être regardée comme irrégulière. Toutefois, compte tenu de la faible importance de ce vice et de ses conséquences, la société ayant au demeurant remis postérieurement un certificat valide jusqu'au 22 septembre 2022 attestant que le fabricant était bien détenteur de ce certificat au moment de la remise des offres, cette irrégularité n'était pas de nature à entrainer l'annulation du contrat.
15. En second lieu, si la société Texabri se prévaut de ce que la société attributaire aurait exécuté le marché en ne respectant ni le cahier des clauses techniques particulières ni son offre, de tels manquements quant aux conditions d'exécution du marché sont sans incidence sur la validité du marché. Au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que ses allégations tenant à la forme de la toiture ou au caractère apparent des fixations soient établies. La commune admet seulement qu'alors que le marché prévoyait que la forme des poteaux devait être arrondie, le titulaire du marché a installé, avec son accord, des poteaux de forme carrée. Ainsi, la société Texabri n'est pas fondée à se prévaloir des éventuelles différences entre les prestations prévues au marché et son exécution pour contester la validité du marché.
16. Il résulte de ce qui précède que la société Texabri n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation du marché en litige.
[…]
MAJ 30/06/24 - Source legifrance
Jurisprudence
CAA Paris, 20 octobre 2020, 18PA20001, société Idea Sécurité (Le seul écart de 45% sur le critère prix entre deux offres ne suffit pas à caractériser une offre comme anormalement basse. Un écart de prix, aussi important que 45%, n’est qu’un indice permettant de supposer le caractère anormalement bas d’une offre. L’écart de prix justifié par 1/ Une estimation financière indicative et un prix proposé semblable à ce qui était pratiqué par le précédent titulaire ; 2/ Des exonérations de cotisations sociales 3/ Un marché entièrement exécuté sans difficultés financières par l’attributaire (marché de prestations de gardiennage)).
Actualités
Ecart de prix de 45% entre deux offres et offre anormalement basse présumée (Dans un arrêt relatif au traitement d'une présumée offre anormalement basse (CAA Paris, 20 octobre 2020, 18PA20001, société Idea Sécurité) la CAA de Paris considère qu'un écart de prix, aussi important que 45%, n’est qu’un indice permettant de supposer le caractère anormalement bas d’une offre. Selon la Cour l’écart de prix était justifié par 1/ Une estimation financière indicative et un prix proposé semblable à ce qui était pratiqué par le précédent titulaire ; 2/ Des exonérations de cotisations sociales 3/ Un marché entièrement exécuté sans difficultés financières par l’attributaire (marché de prestations de gardiennage).