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Conditions dans lesquelles une offre peut être qualifiée d'inacceptable au sens de l'article L2152-3 du code de la commande publique. Le juge des référés rappelle que le dépassement du seuil de 80 000 euros applicable aux procédures adaptées ne constitue pas, en lui-même, un motif suffisant pour rejeter une offre comme inacceptable. Cette qualification nécessite la démonstration par l'acheteur que l'offre excède les crédits budgétaires préalablement alloués au marché.
Résumé
Le code de la commande publique établit un cadre précis pour la qualification d'une offre inacceptable dans les marchés publics. L'article L2152-3 dispose qu'une offre ne peut être qualifiée d'inacceptable que lorsque son prix dépasse les crédits budgétaires alloués au marché. Ces crédits doivent impérativement être déterminés et établis préalablement au lancement de la procédure. Cette exigence s'inscrit dans une logique de transparence et de bonne gestion des deniers publics.
En parallèle, l'article L2181-1 du code impose à l'acheteur public une obligation d'information des candidats non retenus. Cette information doit être suffisamment précise pour permettre aux candidats évincés de comprendre les motifs du rejet de leur offre et, le cas échéant, de contester utilement cette décision devant le juge du référé précontractuel.
Pour les procédures adaptées, l'article R2123-1 du code permet de recourir à cette procédure pour les lots dont la valeur est inférieure à 80 000 euros HT pour les fournitures et services. Toutefois, ce seuil ne constitue pas en lui-même un plafond budgétaire au sens de l'article L2152-3.
En l'espèce, le syndicat mixte Mégalis Bretagne a lancé une consultation pour un marché de mise à disposition, maintenance et exploitation d'une salle régionale des marchés publics, divisé en quatre lots. Les lots 2 et 4 ont fait l'objet d'une procédure adaptée sur le fondement de l'article R2123-1 du code.
L'acheteur a déclaré inacceptables les offres présentées pour ces lots au seul motif qu'elles dépassaient le seuil de 80 000 euros. Le juge des référés considère que cette motivation est insuffisante. En effet, le syndicat mixte n'a produit aucun document attestant de la détermination préalable des crédits budgétaires alloués au marché. Le juge relève également que le syndicat n'a même pas allégué avoir procédé à la fixation du montant de ces crédits indépendamment de l'estimation de la valeur du marché.
Cette irrégularité est d'autant plus significative que le règlement de la consultation prévoyait la possibilité d'une négociation portant notamment sur les éléments financiers de l'offre. Le rejet prématuré des offres pour caractère inacceptable a donc privé les candidats de cette phase de négociation.
Par conséquent, le juge annule la procédure pour les lots 2 et 4 au stade de l'examen des offres et enjoint à l'acheteur, s'il souhaite poursuivre la procédure, de la reprendre à ce stade dans un délai de 15 jours. Cette décision illustre l'importance d'une définition préalable et justifiée des crédits budgétaires alloués au marché, distincte de la simple estimation de sa valeur, pour pouvoir valablement rejeter une offre comme inacceptable.
MAJ 30/08/24
Texte
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18. Aux termes de l'article L2123-1 du code de la commande publique : " Une procédure adaptée est une procédure par laquelle l'acheteur définit librement les modalités de passation du marché, dans le respect des principes de la commande publique et des dispositions du présent livre, à l'exception de celles relatives à des obligations inhérentes à un achat selon une procédure formalisée. L'acheteur peut passer un marché selon une procédure adaptée : 1° Lorsque la valeur estimée hors taxe du besoin est inférieure aux seuils européens mentionnés dans un avis qui figure en annexe du présent code ; () 3° Lorsque, alors même que la valeur estimée du besoin est égale ou supérieure aux seuils de procédure formalisée, la valeur de certains lots est inférieure à un seuil fixé par voie réglementaire ". L'article R2123-1 du même code dispose : " L'acheteur peut recourir à une procédure adaptée pour passer : () 2° Un lot d'un marché alloti dont le montant total est égal ou supérieur aux seuils de procédure formalisée et qui remplit les deux conditions suivantes : a) La valeur estimée de chaque lot concerné est inférieure à 80 000 euros hors taxes pour des fournitures ou des services ou à 1 million d'euros hors taxes pour des travaux ; b) Le montant cumulé de ces lots n'excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots ; () ".
19. Par ailleurs, aux termes de l'article L2152-1 du code de la commande publique : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées ". L'article L2152-3 du même code dispose : " Une offre inacceptable est une offre dont le prix excède les crédits budgétaires alloués au marché, déterminés et établis avant le lancement de la procédure ".
20. Il résulte de l'instruction que, nonobstant l'erreur de plume entachant le règlement de la consultation mentionnant le 1° de l'article L2123-1 précité, les lots nos 2 et 4 du marché litigieux ont fait l'objet d'une procédure adaptée sur le fondement du 3° de cet article. L'offre du groupement dont la société Omnikles est mandataire, s'agissant du lot n° 2, et de celle qu'elle a présenté seule, s'agissant du lot n° 4, ont été déclarées inacceptables par le syndicat mixte Mégalis Bretagne au motif qu'elles excédaient le seuil de 80 000 euros.
21. A cet égard, le syndicat mixte fait valoir que les offres en cause dépassaient nécessairement les crédits budgétaires alloués au marché, dès lors que le montant de chacune d'elle était supérieur au seuil de 80 000 euros visé au a) de l'article R2123-1 précité. Toutefois, une offre ne peut être déclarée inacceptable sur le fondement de l'article L2152-3 du code de la commande publique que s'il résulte de l'instruction qu'elle ne peut être financée par l'acheteur, la seule circonstance que le montant d'une offre soit supérieur à l'estimation des services du pouvoir adjudicateur étant à cet égard sans incidence. Mégalis ne peut donc utilement se prévaloir de ce que la valeur des lots nos 2 et 4 a été estimée à une somme inférieure à 80 000 euros, permettant ainsi le recours à la procédure de passation adaptée. Par ailleurs, le syndicat mixte ne produit aucune pièce relative aux crédits budgétaires alloués au marché avant la procédure, ni même n'allègue avoir procédé à la fixation du montant de ces crédits indépendamment de l'estimation de la valeur du marché. Il en résulte que la requérante est fondée à soutenir que les offres qu'elle a présentées pour les lots nos 2 et 4 ont été déclarées à tort inacceptables.
22. Le syndicat mixte fait valoir que ce manquement n'a pas été susceptible de léser la requérante dès lors que le prix proposé par la société Omnikles conduisait nécessairement au classement de ses offres en seconde position, à supposer qu'une note maximale lui soit attribuée pour les autres critères. Mégalis ne peut toutefois utilement se prévaloir de cette circonstance, dès lors que l'article 9 du règlement de la consultation permettait, pour ces lots, une négociation portant notamment sur les éléments financiers de l'offre. En l'absence de classement des offres de la requérante, la circonstance que ses offres aient été déclarées à tort inacceptables est susceptible d'avoir lésé la société Omnikles qui peut, par suite, utilement se prévaloir de ce manquement.
23. Il résulte de ce qui précède, eu égard à la portée et au stade de la procédure auquel se rapporte le manquement ci-dessus caractérisé, que la décision d'attribution des lots nos 2 et 4 du marché litigieux doit être annulée au stade de l'examen des offres et qu'il doit être enjoint au syndicat mixte Mégalis Bretagne, s'il entend attribuer ces lots, de reprendre la procédure de passation à ce même stade, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente ordonnance.
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Actualités
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Jurisprudence marchés publics et autres contrats publics
CAA Douai, 29 août 2024, n° 22DA01581 ("Pour soutenir que l'offre présentée par la société Assist Partner, attributaire du marché en litige, revêtait un caractère inacceptable, au sens des dispositions de l'article L. 2152-3 du code de la commande publique, et devait, par suite, être écartée en application des dispositions de l'article L. 2152-1 de ce code, la société MO STAZ s'est bornée à faire valoir que le montant de cette offre, représentant plus du double du montant de l'offre qu'elle avait elle-même présentée, qui n'a pas été écartée comme anormalement basse, était particulièrement élevé. Cette seule circonstance n'est pas de nature à laisser supposer que l'offre de la société attributaire, d'un montant de 139 380 euros, excédait le montant des crédits préalablement alloués au marché par le centre hospitalier universitaire et qui n'avait, d'ailleurs, pas été porté à la connaissance des candidats. Eu égard à l'argumentaire ainsi présenté par la société MO STAZ, le moyen tiré de ce que l'offre retenue aurait dû être écartée comme inacceptable doit être écarté, sans qu'il y ait lieu de demander au centre hospitalier universitaire Amiens Picardie de justifier du montant des crédits préalablement affectés à l'opération, ainsi que l'a considéré le tribunal qui n'a pas méconnu son office en s'abstenant de prononcer une telle mesure d'instruction").
CE, 12 juin 2024, n° 475214, Société Actor France (Crédits budgétaires alloués au marché et montant maximum d'un accord-cadre porté à la connaissance des candidats à son attribution. Si les crédits budgétaires alloués à un marché destiné à être passé sous la forme d’un accord-cadre peuvent être inférieurs au montant maximum que prévoit le pouvoir adjudicateur, celui-ci ne peut toutefois écarter comme inacceptable une offre, sur le fondement de l’article 59 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 désormais codifié aux articles L2152-1 et L2152-3 du code de la commande publique (CCP), au motif qu’elle excède le montant de ces crédits budgétaires qu’à la condition que ce dernier montant ait été porté à la connaissance des candidats à son attribution).