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Dans un arrêt du 2 février 2015, la CAA de Paris précise les conditions d'assujettissement à la TVA des primes versées aux candidats évincés dans le cadre d'une procédure négociée. La Cour juge que la prime prévue par le règlement de la consultation au bénéfice des seuls candidats admis à négocier constitue la contrepartie d'une prestation de services individualisable, caractérisée par l'intérêt pour l'acheteur de disposer de projets alternatifs et la cession des droits d'exploitation sur les documents remis. Cette qualification entraîne l'assujettissement à la TVA en application de l'article 256 du CGI, nonobstant le caractère forfaitaire de la prime et l'absence d'utilisation effective des projets non retenus.
https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000027723693/
Résumé
Cette décision précise le régime fiscal des primes versées aux candidats évincés dans le cadre d'une procédure négociée. La juridiction était saisie d'un litige opposant la Communauté d'Agglomération de Marne-et-Gondoire à la société Seura concernant l'assujettissement à la TVA d'une prime de 50 000 euros versée à cette dernière après le rejet de son offre.
La question centrale portait sur la qualification juridique de cette prime : constituait-elle une simple indemnisation forfaitaire ou la contrepartie d'une prestation de services individualisable assujettie à la TVA au sens de l'article 256 du Code général des impôts ?
La Cour rappelle d'abord le fondement juridique de la prime en cause. Celle-ci était prévue par l'article 9.7 du règlement de la consultation, dans le cadre d'une procédure négociée lancée sur le fondement de l'article 35-I-2° du Code des marchés publics. Ce dernier permettait le recours à la procédure négociée pour les marchés de prestations intellectuelles dont les spécifications ne pouvaient être établies avec une précision suffisante pour permettre un appel d'offres.
La juridiction souligne que cette prime n'était due qu'aux candidats admis à négocier par le jury, après une première phase de sélection des candidatures. Son versement était par ailleurs conditionné à la régularité, l'acceptabilité et le caractère approprié de l'offre remise.
La Cour écarte l'argumentation de la Communauté d'Agglomération selon laquelle la prime aurait un caractère purement indemnitaire, dépourvu de contrepartie directe. Elle relève trois éléments déterminants pour qualifier la prime de rémunération d'une prestation de services :
Ces éléments caractérisent selon la Cour "un lien direct entre ce versement et une prestation individualisable" au sens de la jurisprudence fiscale. Il s'agit donc bien d'une "prestation de services rendue à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel", soumise à la TVA en application de l'article 256 du CGI.
Cette décision apporte des précisions pour les acheteurs publics :
1) Elle confirme que le caractère forfaitaire de la prime n'exclut pas son assujettissement à la TVA dès lors qu'elle rémunère une prestation individualisable ;
2) Elle incite les acheteurs à prévoir explicitement dans leurs documents de consultation si les primes sont stipulées HT ou TTC pour éviter tout contentieux ultérieur ;
3) Elle invite à mieux articuler le montant des primes avec la valeur des prestations fournies par les candidats, puisque celles-ci sont désormais clairement qualifiées de prestations de services.
Même si l’arrêt n'indique pas explicitement si la TVA s'applique au candidat retenu, le principe général établi est que toute rémunération pour une prestation de service est assujettie à la TVA. Donc, il est fort probable que les paiements (que ce soit une prime initiale ou un paiement final) versés au candidat retenu soient soumis à la TVA.
Texte
[...]
5. Considérant que la Communauté
d'Agglomération de Marne-et-Gondoire soutient que la
prime litigieuse ne constitue pas la rémunération d'un
service rendu dès lors qu'elle n'utilise pas les
documents transmis par les candidats dont les offres ne
sont pas retenues et que cette prime, dont le montant
est d'ailleurs forfaitaire, n'a pour seul objet que
d'indemniser lesdits candidats ;
6. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'objet même de la consultation en cause, qui a trait à un accord-cadre de maîtrise d'oeuvre, que la prime litigieuse qui n'est due, en vertu des stipulations de l'article 9.7 du règlement de la consultation, qu'aux candidats admis par un jury à négocier avec le pouvoir adjudicateur dans les conditions prévues au b du 4° du III de l'article 74 du code des marchés publics, doit être regardée comme ayant été versée dans le cadre des relations contractuelles ainsi nouées entre ces candidats et le pouvoir adjudicateur, en contrepartie de l'intérêt, pour ce dernier, de disposer de projets alternatifs lui permettant, pour l'attribution de l'accord-cadre dont s'agit, de choisir l'offre économiquement la plus avantageuse ; que, par suite, alors surtout, d'une part, que l'offre de la société Seura n'était ni irrégulière, ni inacceptable, ni inappropriée, d'autre part, que l'article 9.8 du règlement de la consultation prévoit que " Les candidats admis à remettre une offre cèdent à la Communauté d'Agglomération de Marne-et-Gondoire (...) les droits d'exploitation des panneaux issus de la préparation de leur offre (...) ", la prime en cause constitue, au sens et pour l'application du I de l'article 256 du code général des impôts, la rémunération d'une prestation de services rendue à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, en l'espèce la société Seura ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la
Communauté d'Agglomération de Marne-et-Gondoire n'est
pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers
juges, qui n'ont en réalité pas fondé leur décision sur
les dispositions de l'article 74 du code des marchés
publics relatives aux primes dues aux candidats aux
marchés de maîtrise d'oeuvre, certes citées, mais sur
celles de l'article 9.7 du règlement de la consultation
et au seul motif que la prime en cause rémunérait une
prestation de services bénéficiant à la requérante,
l'ont condamnée à verser à la société Seura une somme de
9 800 euros correspondant à la taxe sur la valeur
ajoutée devant être assise sur la prime versée, d'un
montant hors taxes de 50 000 euros ;
[...]
MAJ 15/02/15 - Source legifrance
Jurisprudence
CAA Bordeaux, 27 juin 2013, n° 11BX03327, Sté Coveis Ingéniérie (Indemnisation pour un minimum non atteint dans un marché à bons de commande. L’indemnité n’est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Il résulte de l’article 256 du code général des impôts que le versement d’une somme d’un débiteur à son créancier ne peut être regardé comme la contrepartie d’une prestation de service entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée qu’à la condition qu’il existe un lien direct entre ce versement et une prestation individualisable. L’indemnité perçue par le titulaire d’un marché public du fait que l’administration n’a pas respecté le montant minimal de commandes prévu à ce marché n'est pas la contrepartie d'une prestation mais constitue la réparation d’un préjudice qui est dissociable de la prestation fournie par l’entreprise bénéficiaire du versement. Il en résulte que la somme allouée ne doit pas être majorée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)).