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TA Orléans, 9 août 2022, n° 2202408 dématérialisation

TA Orléans, 9 août 2022, n° 2202408 - Offres dématérialisées tardives et délais de remise des offres

Précisions sur les délais de remise des offres dans les marchés publics et les conditions de rejet des offres dématérialisées hors délai. Le tribunal administratif rappelle la marge d'appréciation de l'acheteur public pour fixer les délais en fonction de la complexité du marché. Le juge pose également les critères permettant d'écarter une offre électronique tardive, à savoir l'absence de diligences normales du candidat et l'absence de dysfonctionnement de la plateforme dématérialisée.

Cette décision porte sur un litige relatif à la passation d'un marché public par le Centre Hospitalier Simone Veil de Blois. La société , soumissionnaire évincée, a demandé l'annulation de la procédure au motif que le délai de remise des offres était trop court et qu'elle n'a pu déposer son offre en ligne en raison d'un dysfonctionnement de la plateforme dématérialisée. 

Le Centre Hospitalier Simone Veil de Blois a lancé un appel d'offres via un avis publié au Journal Officiel de l'Union Européenne le 7 juin 2022. Cet appel d'offres visait à acquérir divers équipements médicaux pour les services d'anesthésie et de réanimation, dans le cadre d'un accord-cadre d'une valeur de 680 000 euros HT, réparti en trois lots distincts. Une société, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de matériel médical, a tenté de soumettre des offres pour l'ensemble des lots.

Cependant, malgré ses tentatives, elle n'a pas réussi à déposer ses offres dans les délais prescrits. Bien qu'elle ait contacté le service de support technique pour obtenir de l'aide, elle n'a pas reçu d'assistance avant l'expiration du délai imparti.

Face à cet échec, le soumissionnaire a essayé de déposer une copie de sauvegarde de ses offres dans l'après-midi, mais celle-ci a été rejetée comme étant tardive par le Centre Hospitalier.

La société a alors saisi le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans, invoquant le non-respect des délais de dépôt. La requête de l'opérateur économique devant le Tribunal administratif d'Orléans vise à obtenir l'annulation de la procédure de passation engagée par le Centre Hospitalier Simone Veil de Blois pour l'attribution de l'accord-cadre.

 

Rappelons que dans le domaine des marchés publics, il est indispensable que les entreprises respectent les délais fixés pour la soumission de leurs offres. En effet, l'article R2151-5 du code de la commande publique prévoit que les offres reçues hors délai doivent être éliminées. Cependant, une exception peut être faite si le soumissionnaire a rencontré des problèmes techniques lors du dépôt électronique de son offre et qu'il peut prouver avoir agi avec diligence et que son équipement informatique était en bon état de fonctionnement (CE, n° 449250, 23 septembre 2021, RATP).

Délai de remise des offres de 33 jours calendaires : suffisant au regard de la technicité

Sur la question du délai de remise des offres, le juge rappelle les dispositions de l'article R2151-1 du Code de la commande publique qui prévoient que "L'acheteur fixe les délais de réception des offres en tenant compte de la complexité du marché et du temps nécessaire aux opérateurs économiques pour préparer leur offre".

Après avoir analysé la nature et la complexité du marché, le Tribunal conclut que "les informations demandées ne présentaient aucune spécificité particulière et que la présentation des offres ne revêtait aucune complexité notable".

Par conséquent, le délai de remise des offres, supérieur au délai minimal légal, était suffisant et n'a pas porté atteinte au principe d'égalité de traitement.

Dépôt dématérialisé de l'offre et diligences attendues d'un candidat pour le téléchargement

S'agissant du dépôt dématérialisé de l'offre, le juge rappelle d'abord que "les offres reçues hors délai sont éliminées" en vertu de l'article L. 2151-5 du Code. Cependant, il nuance cette règle en considérant qu'"l'acheteur public ne saurait toutefois rejeter une offre remise par voie électronique comme tardive lorsque le soumissionnaire (...) établit, d'une part, qu'il a accompli en temps utile les diligences normales attendues d'un candidat pour le téléchargement de son offre et, d'autre part, que le fonctionnement de son équipement informatique était normal".

Le juge examine si la société a effectivement pris "les diligences normales attendues d'un candidat pour le téléchargement de son offre" et si le dysfonctionnement invoqué est réellement imputable à la plateforme dématérialisée. C'est la condition posée par la jurisprudence pour qu'une offre remise hors délai ne soit pas rejetée comme irrégulière.

Le juge relève d'abord que la société s'est connectée seulement 41 minutes avant l'heure limite, alors qu'elle devait déposer 72 pièces au total (24 pièces pour chacun des 3 lots). Il souligne que "compte tenu des précautions prises, cet incident n'a entraîné aucune conséquence pour ces sociétés" faisant référence à deux autres soumissionnaires qui ont dû se connecter à deux reprises mais en amont de la date limite.

Cet élément permet au juge de considérer que la société  "n'a pas pris les mesures utiles pour envoyer son offre en temps utile et réagir en tant que de besoin aux éventuelles lenteurs de transmission ou aux éventuels dysfonctionnements".

Le juge appuie son raisonnement sur le fait que la société "reconnaît que cela impliquait le téléchargement de nombreux documents" et qu'elle "n'a pas pris le soin d'effectuer un dépôt test préalable" comme recommandé dans les conditions générales d'utilisation de la plateforme.

Dysfonctionnement de la plateforme non établi

Concernant l'allégation d'un dysfonctionnement de la plateforme, le juge écarte cet argument en relevant que "l'historique des logs de connexion qu'elle a elle-même produit" démontre que c'est en réalité "un cloud qui lui était propre" qui n'a pu être atteint pour y télécharger les documents.

Notons que certaines plateformes de dématérialisation déconseillent de transmettre les fichiers à partir d'un Cloud ou d'un serveur.

Le juge en conclut donc que "le problème rencontré lors du téléchargement n'a pu, compte tenu de cette connexion tardive, permettre aux services de l'acheteur (...) de trouver un palliatif pour permettre le dépôt de ses offres".

Dépôt hors délai d'une copie de sauvegarde

Concernant le dépôt d'une copie de sauvegarde, objet d'un moyen subsidiaire, le Tribunal se fonde sur l'article 2 de l'arrêté du 22 mars 2019 qui prévoit que "cette copie doit parvenir à l'acheteur dans les délais impartis pour la remise des offres".

La copie de sauvegarde ayant été transmise tardivement, "le centre hospitalier n'avait aucune obligation de l'accepter".

En somme, le juge considère que la société  a fait preuve de négligence en se connectant trop tardivement sans précaution particulière, alors qu'elle avait conscience du volume important de pièces à télécharger. Le dysfonctionnement invoqué est en réalité interne à la société et n'est pas imputable à la plateforme dématérialisée. Par conséquent, l'acheteur public était en droit d'écarter l'offre remise hors délai comme étant irrégulière.

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MAJ 01/09/22

Actualités

Réponse dématérialisée aux marchés publics parvenue hors délai (Un pouvoir adjudicateur peut-il accepter une offre transmise par voie électronique et déposée avec 25 secondes de retard comme en atteste l'accusé de réception émis par la plateforme de dématérialisation utilisée par le pouvoir adjudicateur ? (TA Dijon, 28 décembre 2018, n° 1803328, Sté Numéricarchive). - 15 janvier 2019.

Offre dématérialisée parvenue hors délai : élimination pour 29 secondes de retard (Encore une réponse dématérialisée aux marchés publics parvenue hors délai sur la plateforme de dématérialisation (TA Versailles, 8 février 2023, n° 2300644, Société Seamed France). En matière de délai de remise des plis, même les secondes comptent et le délai s’applique de manière stricte. A l'instar d'une affaire précédente (TA Dijon, 28 décembre 2018, n° 1803328, Sté Numéricarchive) une société considérait aussi que les secondes ne doivent pas être considérées comme éliminatoires. Or, si une offre arrive hors délai, donc après la date et l’heure limite fixées dans les documents de la consultation, même s’il est accessible dans le profil acheteur, le pli est considéré comme hors délai et il doit être rejeté). - 11 février 2023.