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TA Guadeloupe, n° 2401118 - Offre irrégulière et conséquences de l'incomplétude

Tribunal administratif de Guadeloupe, 3 septembre 2024, n° 2401118 - Offre irrégulière et conséquences de l'incomplétude

Régularité du rejet d'une offre incomplète dans un marché public, rappelant l'obligation pour les candidats de respecter les exigences formelles des documents de consultation. Importance de la charge de la preuve incombant au candidat évincé et rejet de l'argument relatif à un dossier de sauvegarde non prouvé. Limites du référé précontractuel en matière d'autorisation de signature du marché. 

Dans le cadre des marchés publics, toute offre ne respectant pas les exigences formelles énoncées dans les documents de consultation, notamment en termes de complétude, peut être légitimement rejetée comme irrégulière par l'acheteur public.

La charge de la preuve de la conformité de l'offre incombe au candidat. En l’espèce, l'offre de la société candidate a été rejetée car elle ne contenait pas toutes les pièces exigées par le règlement de consultation.

Le juge valide cette décision, considérant que l'acheteur public était dans son droit de rejeter une offre incomplète, d'autant plus que le candidat n'a pas pu prouver avoir remis un dossier de sauvegarde complet.

Contexte et procédure

Le Service Départemental d'Incendie et de Secours (SDIS) de la Guadeloupe a lancé le 3 juillet 2024 une procédure adaptée ouverte pour l'acquisition de divers équipements, dont une presse à balles électrique (lot n°3).

La société ADI 97 s'est portée candidate pour ce lot, mais son offre a été jugée irrégulière pour incomplétude.

Elle a donc saisi le juge des référés précontractuels sur le fondement de l'article L.551-1 du Code de justice administrative (CJA) pour contester cette décision.

 Cadre juridique

Le juge fonde son raisonnement sur plusieurs dispositions :

  • L'article L.551-1 du CJA qui définit le référé précontractuel : "Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs [...]"
  • L'article L.2152-1 du Code de la commande publique (CCP) : "L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées."
  • L'article L.2152-2 du CCP : "Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale."

Le juge rappelle que ces dispositions imposent à l'acheteur d'éliminer les offres ne respectant pas les exigences des documents de consultation, sauf s'il a autorisé leur régularisation.

Analyse du juge

Exigences du règlement de consultation

Le juge examine d'abord les articles 5.1 et 6.1 du règlement de consultation, qui exigeaient :

  • La transmission d'un pli de candidature par voie électronique
  • Deux dossiers distincts : un pour la candidature, un pour l'offre
  • Des pièces spécifiques pour l'offre, dont l'acte d'engagement signé, le cahier des clauses techniques particulières signé et le bordereau des prix unitaires

Le règlement prévoyait aussi la possibilité de doubler le pli numérique d'une copie de sauvegarde sur support physique.

Examen de l'offre de ADI 97

Le juge constate, sur la base du bordereau de contrôle de pli dématérialisé produit par le SDIS, que seul l'acte d'engagement signé figurait dans le dossier d'offre pour le lot n°3. Il en conclut que le dossier transmis par voie électronique était incomplet au regard des exigences du règlement.

Concernant l'allégation d'ADI 97 d'avoir remis un dossier de sauvegarde complet en version papier, le juge note l'absence de commencement de preuve et la contestation ferme du SDIS.

Conclusion du juge

Le juge estime que c'est à bon droit que l'offre d'ADI 97 a été rejetée comme irrégulière pour incomplétude. Il rejette donc les conclusions aux fins d'annulation de la procédure de passation.

[...]

3. L'article L. 2152-1 du code de la commande publique dispose que : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées ". L'article L. 2152-2 du même code dispose quant à lui que : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale ". Il résulte de ces dispositions que l'acheteur doit éliminer les offres qui ne respectent pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, sauf, le cas échéant, s'il a autorisé leur régularisation.

4. Il résulte de l'instruction, et en particulier des articles 5.1 et 6.1 du règlement de la consultation qu'il était exigé des candidats au lot 3 qu'ils transmettent au pouvoir adjudicateur un pli de candidature par voie électronique comportant deux dossiers distincts, un dossier comportant les pièces de la candidature et un dossier comportant les pièces de l'offre énumérées au 5.1 du même règlement et incluant notamment, outre l'acte d'engagement signé, le cahier des clauses techniques particulières signé et le bordereau des prix unitaires pour chacun des lots. Le règlement de la consultation prévoyait en outre la possibilité de " doubler " le pli numérique " d'une copie de sauvegarde transmise dans les délais impartis, sur support physique électronique ou sur support papier " ouverte " lorsque le pli électronique est reçu de façon incomplète () ".

5. Si la société requérante soutient avoir bien déposé un dossier de candidature comportant l'intégralité des pièces exigées par voie électronique, il résulte du bordereau de contrôle de pli dématérialisé, dont une capture d'écran est produite par le SDIS, que seul l'acte d'engagement signé figurait dans le dossier censé comporter les pièces de l'offre pour le lot n° 3. Par suite, elle doit être regardée comme ayant transmis par voie électronique un dossier incomplet au regard des exigences formulées dans les documents de la consultation. Si la société ADI 97 soutient en outre avoir rendu un dossier de sauvegarde complet en version papier, elle n'assortit cette allégation, fermement contestée par le SDIS, d'aucun commencement de preuve. Par suite, c'est à bon droit que son offre a été rejetée comme irrégulière aux motifs de son incomplétude.

6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de la procédure de passation litigieuse doivent être rejetées.

Sur les conclusions reconventionnelles tendant à autoriser la signature du marché :

7. Aux termes de l'article L. 551-4 du code de justice administrative : " Le contrat ne peut être signé à compter de la saisine du tribunal administratif et jusqu'à la notification au pouvoir adjudicateur de la décision juridictionnelle. "

8. Il résulte de ce qui précède que le marché en litige peut être signé dès la notification de la présente ordonnance. Par suite, il n'appartient pas au juge des référés d'autoriser le SDIS de la Guadeloupe à procéder à cette signature..

[...].

MAJ 07/09/24

Jurisprudence

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