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CAA Nantes, 12 janvier 2016, n° 14NT00670 – Qualification d’un marché de travaux

CAA Nantes, 12 janvier 2016, n° 14NT00670 – Qualification d’un marché de travaux

Critères permettant de qualifier un marché de travaux malgré l'importance des fournitures, en se fondant sur une analyse concrète des prestations. Encadrement du contrôle du juge sur l'appréciation technique des offres par le pouvoir adjudicateur, en validant des écarts de notation dès lors qu'ils sont objectivement justifiés, particulièrement après négociation. La rectification d'une erreur matérielle de calcul est admise comme exception au principe d'intangibilité des offres.

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000031937194   

Qualification du marché et régularité de la procédure

La Cour rappelle que la qualification d'un marché public de travaux ne dépend pas uniquement de la part respective des fournitures et des travaux dans le montant total du marché. Elle s'attache à une analyse concrète des prestations attendues, qui en l'espèce comprenaient :

  • La conception et l'adaptation spécifique des installations
  •  Des travaux immobiliers substantiels (démolition/reconstruction de dalle béton)
  •  Une réalisation échelonnée sur plusieurs semaines
  •  L'intervention d'un maître d'œuvre et d'un contrôleur technique
  •  Des moyens humains importants à mobiliser

La Cour écarte l'argument selon lequel il s'agirait d'un marché de fournitures avec des travaux accessoires, même si le coût des équipements était supérieur à celui des travaux. La qualification de marché de travaux justifiait dès lors le recours à une procédure adaptée, le montant étant inférieur au seuil de 5 millions d'euros prévu à l'article 26-II-5° du code des marchés publics alors applicable.

Appréciation des offres et erreurs alléguées

La Cour encadre le contrôle du juge sur l'appréciation des offres par le pouvoir adjudicateur. Elle examine les griefs relatifs aux quatre sous-critères de la valeur technique :

  • Pour la description de la solution technique (25 points), l'amélioration de la note de l'attributaire après négociation est justifiée par un procédé innovant de mise en veille
  •  Pour la méthodologie et le planning (15 points), l'écart d'un point entre les candidats reflète des points forts différents.
  •  Pour les moyens humains (10 points), la note maximale attribuée aux deux offres n'est pas manifestement injustifiée.
  •  Pour les moyens environnementaux (10 points), l'augmentation de la note de l'attributaire est expliquée par l'innovation technologique apportée.

La Cour souligne qu'un soumissionnaire ne peut utilement comparer les offres dans leur état avant négociation, seule l'offre finale devant être prise en compte.

Elle valide également la rectification d'une erreur matérielle de calcul dans le prix, considérant que le principe d'intangibilité des offres peut exceptionnellement céder dans ce cas. L'erreur matérielle en l'espèce concerne une modification unilatérale du prix global et forfaitaire de l'offre de la société RLS Delta Neu par la région Centre. Plus précisément, l'analyse des offres avant négociation mentionne un montant "à l'ouverture" de 297 500 euros et un montant "vérifié" de 301 510 euros HT. Le commentaire associé à cette modification est "erreur de calcul. Prix retenu = somme des postes DPGF"). 

[...]

6. Considérant qu'il résulte du dossier de consultation des entreprises et des stipulations du CCTP, que compte tenu, d'une part, de la nature des prestations attendues, de conception et d'adaptation spécifique de l'installation de captage des poussières bois de l'atelier de modelage et du système de ventilation du laboratoire résine aux installations existantes, se traduisant par l'exigence de notes de calcul et d'études d'exécution, d'autre part, de la nécessité de procéder à des travaux à caractère immobilier pour déposer les ouvrages existants, démolir puis reconstruire la dalle support en béton, et réaliser les travaux de tuyauteries et câblages pour installer les nouveaux équipements, ainsi que des conditions de réalisation de ces travaux devant s'échelonner sur plusieurs semaines et réalisés sous la direction d'un maître d'oeuvre et en présence d'un contrôleur technique, enfin, de l'importance des moyens humains à mettre en oeuvre pour la réalisation de ce marché, ainsi qu'il ressort notamment du mémoire technique de la société RLS Delta Neu, les travaux commandés par la région Centre ne pouvaient être regardés comme des prestations accessoires à la fourniture des équipements d'aspiration et de ventilation, quand bien même le coût de ces derniers excédait celui des travaux ; qu'ainsi, en vertu des dispositions précitées du dernier alinéa du III de l'article 1er du code des marchés publics, il s'agissait d'un marché public de travaux ; que dès lors que son montant n'excédait pas le seuil mentionné au 5° du II de l'article 26 du même code, la société RLS Delta Neu n'est pas fondée à soutenir que la région Centre n'a pu régulièrement mettre en oeuvre la procédure adaptée prévue par l'article 28 du code des marchés publics ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que la société RLS Delta Neu soutient que la région Centre aurait procédé à une modification unilatérale de son offre en faisant passer le prix global et forfaitaire de celle-ci avant négociation de 297 500 à 301 510 euros HT ; qu'il est constant que l'analyse des offres avant négociation mentionne, s'agissant de l'évaluation de l'offre de la société RLS Delta Neu au regard du critère du prix, un montant " à l'ouverture " de 297 500 euros, et un montant " vérifié " de 301 510 euros, avec le commentaire suivant : " erreur de calcul. Prix retenu = somme des postes DPGF " ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que le pouvoir adjudicateur a ainsi entendu en réalité modifier de lui-même une erreur de calcul du prix global et forfaitaire de l'offre initiale de la requérante ; que, toutefois, cette irrégularité est sans influence sur la validité du contrat conclu dans la mesure où, d'une part, elle ne porte pas sur le prix de l'offre définitive de la société RLS Delta Neu ; que, d'autre part, le principe de l'intangibilité des offres, invoqué par la requérante, ne saurait recevoir application dans le cas exceptionnel où il s'agit de rectifier une erreur purement matérielle, d'une nature telle que nul ne pourrait s'en prévaloir de bonne foi dans l'hypothèse où le candidat verrait son offre retenue ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du règlement de la consultation que la région Centre a retenu, pour la sélection des offres, outre le critère du prix noté sur 40 points, le critère de la valeur technique, noté sur 60 points et apprécié au regard de quatre sous-critères, la description de la solution technique, pour 25 points, la méthodologie d'intervention et planning, pour 15 points, les moyens humains, pour 10 points et les moyens environnementaux, également pour 10 points ; que la société RLS Delta Neu soutient qu'en choisissant la société Samsoud Applications, le pouvoir adjudicateur a commis plusieurs erreurs manifestes d'appréciation dans l'analyse comparée des offres ;

9. Considérant que la première des erreurs invoquées tiendrait à ce que la requérante et la société Samsoud Applications, attributaire, ont obtenu la même note de 20/25 sur le sous-critère 1 " Description de la solution technique " avant négociation, alors que leurs appréciations divergeaient, et que l'augmentation de la note de l'attributaire de deux points la portant à 22/25 après négociation ne serait aucunement justifiée ; que, d'une part, la société RLS Delta Neu ne saurait utilement comparer son offre à celle de l'attributaire dans l'état où elle se trouvait avant la négociation et non dans l'état où elle a été effectivement sélectionnée ; que, d'autre part, il ressort du tableau comparatif du rapport d'analyse des offres que les deux sociétés proposaient dès le départ un moto-ventilateur permettant " une souplesse de réglage et des économies d'énergie en pilotant le débit au plus près du besoin " et que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'évolution proposée par l'attributaire après négociation n'a pas consisté à adopter le même procédé figurant ab initio dans son offre à elle mais permettait un supplément d'économie d'énergie, par l'apport d'un procédé de mise en veille innovant comportant un système de détection de présence installé sur plusieurs équipements de l'atelier, permettant des économies de fonctionnement et une diminution du niveau sonore ;

10. Considérant que la société RLS Delta Neu soutient également qu'elle aurait du obtenir tous les points dans la notation du sous-critère 2 de la valeur technique " Méthodologie d'intervention et planning " dès lors qu'il ressort du rapport d'analyse des offres que son offre répondait en tous points au cahier des charges et qu'elle n'a obtenu pourtant que 13/15, alors que le planning fourni par la société Samsoud Applications était jugé " peu détaillé " et que celle-ci a néanmoins obtenu 12/15 à ce même sous-critère ; qu'il résulte en réalité de l'instruction, en particulier des remarques respectivement portées dans le tableau comparatif d'analyse des offres, que les appréciations des offres de la requérante et de l'attributaire pour le sous-critère susmentionné étaient proches, avec des points forts différents, et que l'écart d'un point les distinguant pour ce sous-critère n'apparaît pas manifestement injustifié ;

11. Considérant que, sur la notation du sous-critère 3 " Moyens humains " de la valeur technique, la société RLS Delta Neu se plaint de ce que son offre, qui était complète et optimale, n'a obtenu que 8/10 et aurait été " manifestement sous-évaluée ", tandis que celle de la société Samsoud Applications, qui était simplement " satisfaisante ", a été notée 10/10 et ainsi surévaluée ; que, toutefois, elle ne peut utilement invoquer la circonstance que son offre initiale à 8/10 aurait été sous-évaluée, puisqu'après négociation elle a obtenu la note maximale de ce sous-critère à 10/10 ; que l'appréciation de l'offre de l'attributaire en termes de " moyens humains " la fait apparaître comme complète, d'un bon niveau et satisfaisante, ce qui lui vaut également la note de 10/10, sans qu'il résulte de l'instruction qu'au regard des éléments de l'offre cette dernière note serait manifestement surévaluée ;

12. Considérant, enfin, que la société RLS Delta Neu soutient qu'alors que sa propre note de 9/10 est restée identique, la notation de l'offre de la société Samsoud Applications sur le sous-critère 4 " Moyens environnementaux " aurait été surévaluée en étant portée de 7 à 9 sur 10 après négociation, dans la mesure où l'attributaire n'a apporté à son offre sur ce sous-critère que des modifications mineures portant sur la mise en veille de l'installation ; qu'il résulte toutefois du tableau comparatif des offres que pour celle de la requérante comme pour celle de l'attributaire, sur ce sous-critère 4 de la valeur technique, il est énoncé que " l'ensemble montre une prise en charge des contraintes environnementales d'un bon niveau " et qu'après négociation les offres apparaissent équivalentes, la revalorisation de deux points de la note de Samsoud Applications s'expliquant notamment par l'apport d'un procédé de mise en veille innovant ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 12 que l'appréciation par le pouvoir adjudicateur de la valeur respective des offres de la société RLS Delta Neu et de la société Samsoud Applications n'est pas entachée des erreurs manifestes invoquées ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 12 que les irrégularités alléguées du contrat doivent être écartées et que, par voie de conséquence, la société RLS Delta Neu n'est pas fondée à demander réparation du préjudice en résultant pour elle ;

[...]

MAJ 20/01/16 - Source legifrance

Jurisprudence

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