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16 juillet 2023
Pour justifier la passation d’un marché public sans mise en concurrence préalable deux conditions doivent être respectées. D’une part un certificat d’exclusivité peut parfois être produit mais son contenu doit être suffisamment précis, d’autre part l’acheteur doit démontrer que la société retenue est la seule à pouvoir répondre à ses besoins et qu’aucun autre procédé ne peut les satisfaire.
A l’occasion d’un contrôle des procédures d’achat de l’Ecole Centrale de Marseille (ECM) la Cour des comptes rappelle les conditions de recours aux marchés passés sans publicité ni mise en concurrence préalables pour des raisons tenant à la protection de droits d’exclusivité (ECM, Rapport d’observations définitives, exercices 2014-2020).
En effet, selon les dispositions l'article R2122-3 du code de la commande publique, un marché peut être conclu sans publicité ni mise en concurrence préalables lorsque les travaux, fournitures ou services "ne peuvent être fournis que par un opérateur économique déterminé, pour des raisons techniques, artistiques ou tenant à la protection de droits d’exclusivité". Le 3° de cet article s’appuie sur la raison relative à "L'existence de droits d'exclusivité, notamment de droits de propriété intellectuelle" sachant que le recours à un opérateur déterminé dans ce cas n'est justifié que lorsqu'il n'existe aucune solution de remplacement raisonnable et que l'absence de concurrence ne résulte pas d'une restriction artificielle des caractéristiques du marché.
Il en résulte que le recours à cette possibilité nécessite le respect de deux conditions :
Lors du contrôle il a été reproché à l'ECM d'avoir accepté un certificat rédigé par l'entreprise elle-même, imprécis quant à son contenu pour des fins de justification.
Certificat d'exclusivité non admis. La production d’un certificat d’exclusivité peut poser des problèmes en fonction de son contenu s'il est imprécis. Ainsi un document intitulé "certificat d'exclusivité" établi au profit du titulaire ne suffit pas pour justifier le recours à la procédure de marché négocié sans publicité préalable et sans mise en concurrence. Dans une affaire opposant la société Steam France à l'AP-HP qui avait attribué le marché à la société Getinge France, ce document se bornait à énumérer de manière succincte et générique une liste de matériels et prestations pour lesquels ladite société disposerait d'une exclusivité. Il ne permettait pas de déterminer la période au cours de laquelle cette exclusivité se serait appliquée, ni s'il a été communiqué à l'acheteur au moment de la détermination du mode de passation du marché litigieux (CAA Paris, 11 décembre 2018, n° 17PA01588, Société Steam France).
Certificat d'exclusivité admis. La procédure négociée sans mise en concurrence de l’article 35-II 8° du code des marchés publics avait été admise dans un marché informatqique quant à la protection de droits d’exclusivité pour l’exploitation et la maintenance d’un espace numérique de travail. Justification des droits d’exclusivité sur le logiciel par un certificat délivré par l’Agence pour la protection des programmes (APP) et une attestation non contestée émanant de la société éditrice, cette exclusivité englobant l’exploitation et la maintenance d’un logiciel (CE, 2 octobre 2013, n° 368846, Département de l’Oise / Sté Itslearning France).
La Cour des comptes a contrôlé l’Ecole Centrale de Marseille (ECM) notamment pour ses procédures d’achat. L’ECM avait passé des sans publicité ni mise en concurrence sur les fondements des articles L2122 -1 et R2122-3 du code de la commande publique relatif aux marchés sans publicité ni mise en concurrence.
L’ECM a transmis les pièces justificatives relatives à un marché public pour l’acquisition de l’extension "tube nano" et mise à niveau du microtomographe RX1617 du Laboratoire de Mécanique et d’Acoustique (LMA). Ce marché était passé en application des dispositions des articles L2122-1 et R2122-3 du code la commande publique, sans publicité ni mise en concurrence "car il existe sur les prestations ordonnées un droit d’exclusivité détenu par le prestataire choisi". Un certificat d’exclusivité était joint à l’acte d’engagement à titre de justificatif.
Or, selon la Cour, le certificat d’exclusivité joint à l’appui, signé par l’entreprise "se contente d’affirmer que la prestation demandée « ne peut être réalisée par une autre entreprise (...). L’adaptation tant mécanique que logicielle d’un tel équipement nécessite le savoir-faire et les données techniques internes à la société qui a fabriqué l’équipement. Il n’existe aucune entreprise au niveau mondial qui dispose des connaissances et capacités pour réaliser ces travaux" ».
Elle ajoute que "de tels documents rédigés par l’entreprise, elle-même, ne comportent pas de précisions suffisantes pour justifier que le marché ne puisse être confié qu’à un seul opérateur économique pour des raisons tenant à la protection de droits d’exclusivité".
Le Code de la commande publique exige "que les besoins du pouvoir adjudicateur ne puissent être satisfaits que par les prestations protégées par ce droit et à l'exclusion de procédés différents" et que "un seul fournisseur soit susceptible d'effectuer les prestations recherchées".
A cette fin il faut que le pouvoir adjudicateur puisse démontrer qu'un seul opérateur économique puisse satisfaire ses besoins.
Tel est le cas, par exemple, pour un marché sans mise en concurrence pour des prestations ayant nécessairement un caractère unique : une mise en concurrence pour l’achat spécifique de billets, dont seul le club de football “ Olympique Lyonnais “ est le distributeur, s’avère impossible (CE, 28 janvier 2013, n° 356670, Département du Rhône).
Il en résulte, selon la Cour, que "le pouvoir adjudicateur doit disposer d’un rapport précis sur l’exception de mise en concurrence, car il incombe à l’acheteur de démontrer que la société retenue est la seule à pouvoir répondre à ses besoins". En l’espèce "un tel rapport semble avoir fait défaut".
En conclusion, la Cour constate que le recours à une procédure d’achat sans mise en concurrence ni publicité n’est pas suffisamment démontré compte tenu :
Recommandation n° 6. (ECM) : Formaliser dans la « Charte d’orientation de l’achat public de Centrale Marseille » la possibilité de recourir aux articles L2122-1 et R2122- 3 du code de la commande publique aux fins de préciser la procédure interne à suivre dans ce cadre et prévoir à ce titre que les rapports justifiant le recours aux dérogations précitées soient systématiquement signés par les demandeurs ainsi que dûment visés par les responsables d’unités, copie de ces rapports devant être conservée dans les services de l’ordonnateur et à l’agence comptable.
Actualités
Marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence et certificat d’exclusivité. - 29 décembre 2018.
Questions écrites au sénat ou à l'assemblée nationale - Réponses ministérielles
QE Sénat n° 00359, Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Renouvellement du contrat avec Microsoft Irlande et attestation d'exclusivité de la distribution des licences Microsoft en Europe).