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10 mai 2017
Une instruction interministérielle du 27 avril 2017 (NOR : ARCB1710251J) relative aux délibérations et actes des collectivités territoriales décrit l'état du droit dont peuvent se prévaloir les préfets dans le traitement des actes des collectivités territoriales qui tendraient à limiter, voire interdire, le recours aux travailleurs détachés. Un développement particulier est consacré à la clause dite «Molière», qui vise à imposer l'usage du français par les salariés des candidats aux marchés publics
Rappelons que la "clause Molière", a été introduite par plusieurs collectivités dans leurs marchés publics pour "lutter contre le travail détaché".
L’instruction relative aux délibérations et actes des collectivités territoriales décrit l'état du droit dont peuvent se prévaloir les préfets dans le traitement des actes des collectivités territoriales qui tendraient à limiter, voire interdire, le recours aux travailleurs détachés.
L'instruction rappelle les textes qui rendent illégale l'interdiction du recours à des travailleurs détachés par un acheteur ou une autorité concédante.
Ces textes ont une origine européenne dont :
L'instruction souligne par ailleurs que "A cet égard, l'acheteur ne saurait notamment solliciter des candidats à un marché public la remise d'une déclaration sur l'honneur de non recours au travail détaché.
Il ressort en effet de l'application combinée des articles 45 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et 51 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatifs aux marchés publics que la liste des documents pouvant être demandés au stade de l'examen des candidatures est limitativement fixée par un arrêté du 25 mars 2016, à l'exception de ceux nécessaires à l'appréciation de la capacité économique et financière des candidats et du cas spécifique des marchés publics de défense ou de sécurité. Dès lors, un acheteur ne peut exiger des soumissionnaires la remise d'un document tel que la déclaration sur l'honneur précitée."
Il ressort des dispositions des articles L5221-3 et L5221-1 du code du travail que ledit code n'impose pas l'obligation de parler ou de comprendre le français à l'égard des ressortissants de l'Union européenne, des étrangers qui ne s'installent pas durablement en France, ainsi que des salariés détachés.
La circulaire met donc en garde "les collectivités qui adoptent de telles délibérations" et qui "vont par conséquent au-delà de ce que le législateur a prévu." et ajoute que "Les actes obligeant les entreprises à respecter de telles conditions présentent un caractère discriminatoire et portent une atteinte non justifiée au principe d'égal accès à la commande publique."
La circulaire en conclut qu'une "telle clause ne peut être licite, par exception, que si elle est en lien avec l'objet du marché public ou du contrat de concession et nécessaire à son exécution. Tel pourrait être le cas par exemple d'une clause imposant la maîtrise du français dans le cadre de certaines prestations de formation."
Enfin, les « clauses » précédemment décrites sont illégales et doivent être traitées comme telles, qu'il s'agisse de délibérations prévoyant de tels dispositifs ou de marchés publics ou contrats de concession contenant ces clauses.
Plusieurs régions ont introduit la clause «Molière» , notamment en Ile-de-France, en Auvergne-Rhône-Alpes, dans les Pays de la Loire.
Dans cette dernière région le tribunal administratif de Nantes a admis la clause imposant la maîtrise du français sur le chantier.
Le 10 juillet 2017 Bruno RETAILLEAU a annoncé sur son blog que "Le Tribunal Administratif de Nantes vient de donner raison à la Région en considérant que la clause d’interprétariat dite « clause Molière », que nous avions introduite dans nos marchés publics, n’est pas contraire au droit. Cette clause exige le recours à un interprète pour informer les travailleurs qui ne parlent pas français de la législation sociale."
Il faut naturellement modérer la "victoire" de cette région vu qu'il ne s'agit que d'une décision de première instance.
TA Nantes, 7 juillet 2017, n° 1704447, Préfet de la Région Pays de La Loire
Par une requête enregistrée le 22 mai 2017 sous le numéro 1704447, la préfète de la région Pays de la Loire, avait demandé au juge des référés 1°) d'annuler la procédure engagée par la Région des Pays de la Loire en vue de la passation du marché public de travaux relatif à la mise en accessibilité handicaps et à la réfection des cours du lycée Ambroise Paré à Laval (Mayenne) ; 2°) de supprimer la clause d'interprétariat dans les pièces de ce marché, et en particulier les articles 8 et 12 du CCAP ; 3°) d'enjoindre à la Région des Pays de la Loire de reprendre la procédure de publicité et de consultation relative à ce marché à ses débuts.
Les clauses litigieuses de l'article 8 du CCAP, relatif aux obligations et engagements en matière de responsabilité sociétale des entreprises, sont rédigées dans les termes suivants : « 8.4.1 - protection sociale / Afin de permettre au maître d'ouvrage d'exercer son obligation de prévention et de vigilance, et sur demande du coordonnateur en matière de sécurité et protection de la santé, du maître d'oeuvre ou du maître d'ouvrage, le titulaire est tenu de recourir, à ses frais, à un interprète qualifié dans les langues concernées, si les personnels présents sur le chantier, quelle que soit leur nationalité, ne disposent pas d'une maîtrise suffisante de la langue française pour leur permettre de comprendre la réglementation sociale en application du Code du travail. / La prise en charge des frais d'interprétariat se fera aux seuls frais du titulaire. / 8.4.2- prévention de sécurité 1 Afin de garantir la sécurité des travailleurs et visiteurs sur le chantier lors de la réalisation de tâches, signalées par le coordonnateur en matière de sécurité et protection de la santé, le maître d'oeuvre ou le maître d'ouvrage, comme présentant un risque pour la sécurité des personnes et des biens, notamment en cas de coactivé, les personnels affectés à l'exécution de ces tâches, et quelle que soit leur nationalité, recevront une formation spécifique à cette fin et devront être en mesure de comprendre et échanger sur les directives orales et/ou écrites nécessaires à l'exécution desdites tâches. / A cet effet, et faute de maîtrise suffisante de la langue française par le personnel visé au précédent alinéa, le titulaire sera tenu, après infonnation préalable du coordonnateur en matière de sécurité et protection de la santé et du maître d'oeuvre, de veiller à l'intervention d'un interprète qualifié clans les langues concernées. 1 La prise en charge des frais d'interprétariat se fera aux seuls frais du titulaire. / 8.4.3 - Défaut de recours à un interprète 1 En cas de carence constatée ou du défaut de preuve de la qualification d'un interprète, la Région désignera un ou des interprètes de son choix. Les frais consécutifs seront comptabilisés comme pénalités au titre de l'article afférent au présent cahier des clauses administratives particulières ; une pénalité forfaitaire sera également appliquée. De plus, après mise en demeure restée sans effet, la résiliation du marché pourrait être prononcée aux frais et risques du titulaire.» ; et que celles de l'article 12, relatif aux pénalités, sont les suivantes: « 12.2.7- non-respect des obligations en matière d'interprétariat / En cas de non-respect des obligations en matière d'interprétariat sur le chantier ou de défaut de preuve de la qualification de l'interprète, le titulaire encourt, sans mise en demeure préalable, une pénalité correspondant aux frais consécutifs pour la Région des Pays de la Loire, assortie d'une pénalité forfaitaire de 100,00 euros par jour de carence constaté. >>
Dans ses 5ème et 6ème considérants le tribunal administratif juge que :
"5. Considérant, d'une part,
6. Considérant, d'autre part,
Textes
Instruction interministérielle NOR : ARCB1710251J (Clause dite « Molière ») du 27 avril 2017 relative aux délibérations et actes des collectivités territoriales imposant l'usage du français dans les conditions d'exécution des marchés - NOR : ARCB1710251J (Clause dite « Molière »)
Jurisprudence
CE, 8 février 2019, n° 420296, Veolia Eau et SIIAP, mentionné aux tables du recueil Lebon (Clause Molière et recours à des sous-traitants et des salariés étrangers sans imposer l'usage de la langue française).
CAA Paris, 13 mars 2018, n° 17PA03641, préfet de la région d'Ile-de-France (Clause Molière et suspension de l'exécution du marché public comprenant une clause "Langue et rédaction de propositions et d'exécution des prestations").
CE, 4 décembre 2017, n° 413366, Ministre de l’intérieur c/ Région Pays de la Loire (Le Conseil d’Etat valide une clause d’interprétariat utilisée par la région Pays de la Loire. Le Conseil d’Etat précise que les « clauses d’interprétariat » qui imposent aux entreprises candidates de prévoir le recours à un interprète pour exposer les droits sociaux dont disposent les travailleurs et les règles de sécurité qu'ils doivent respecter sur le chantier ne doivent pas être confondues avec les clauses dites « Molière », qui visent à imposer l’usage exclusif du français sur les chantiers).
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