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jurisprudence

Conseil d’Etat, 23 mai 1979, n° 00063, commune de Fontenay-le-Fleury

L'entrepreneur dont le contrat est entaché de nullité est fondé à réclamer, en tout état de cause, le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé. Dans le cas où la nullité du contrat résulte d'une faute de l'administration, l'entrepreneur peut en outre prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute et, le cas échéant, demander à ce titre le paiement du bénéfice dont il a été privé par la nullité du contrat, si toutefois le remboursement des dépenses utiles ne lui assure pas une rémunération supérieure à celle a laquelle il aurait eu droit en application des stipulations du contrat.

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007684724

Un avenant au contrat initial, conclu de gré à gré, avait pour effet d'augmenter la valeur totale du marché au point de dépasser le seuil applicable à cette procédure. Le Conseil d'État a jugé cet avenant nul, considérant qu'il conduisait à un contournement des règles de mise en concurrence applicables aux marchés dépassant un certain seuil. Cet arrêt met en évidence la position initiale de la jurisprudence, qui interdisait tout dépassement de seuil, quel que soit le motif de la modification. Cette approche visait à garantir le respect strict des procédures de passation des marchés publics et à prévenir tout risque de favoritisme ou de manque de transparence.

L'arrêt du Conseil d'État du 23 mai 1979, n° 00063, Commune de Fontenay-Le-Fleury concerne le dépassement de seuil lors de la modification d'un marché public.

La commune de Fontenay-le-Fleury avait conclu un contrat de gré à gré avec la société T.E.F.I.D. pour l'enlèvement des ordures ménagères. Un avenant modifiant le prix du marché en fonction du nombre d'habitants a ensuite été passé, toujours de gré à gré. Cet avenant a conduit à un dépassement du seuil applicable à la procédure de gré à gré, la valeur totale du marché modifié excédant le seuil qui obligeait la commune à recourir à une adjudication.

Le Conseil d'État a jugé cet avenant nul car il entraînait un dépassement du seuil de la procédure initialement utilisée. Le raisonnement du Conseil d'État était qu’un tel avenant constituait un contournement des règles de mise en concurrence. En modifiant le contrat pour dépasser le seuil, la commune aurait pu se soustraire à une procédure d'adjudication, plus transparente et ouverte à la concurrence.

Cet arrêt, rendu à la fin des années 1970, illustre la position stricte de la jurisprudence de l'époque. Tout dépassement de seuil lors d'une modification de marché était considéré comme illégal. Cette approche visait à garantir le respect des principes fondamentaux de la commande publique, notamment la transparence et l'égalité de traitement des candidats.

La jurisprudence a évolué depuis cet arrêt. Le dépassement de seuil n'est plus automatiquement considéré comme illégal. Sa régularité est appréciée au cas par cas par le juge administratif, en tenant compte de facteurs tels que la prévisibilité des nouveaux besoins et l'absence de scission artificielle du marché.

L'arrêt CE 23 mai 1979, Commune de Fontenay-Le-Fleury, reste une référence importante pour comprendre l'évolution de la jurisprudence en matière de dépassement de seuil. Il met en évidence l'importance du respect des seuils de procédure et des principes de la commande publique, tout en reconnaissant que la jurisprudence a adopté une approche plus souple au fil du temps.

Conseil d'Etat

statuant au contentieux

N° 00063

Publié au Recueil Lebon

6 / 2 SSR

Lecture du 23 mai 1979

Requête de la commune de FONTENAY-LE-FLEURY tendant a l'annulation du jugement du 23 avril 1975 du tribunal administratif de Versailles déclarant la commune de FONTENAY-LE-FLEURY responsable des conséquences dommageables résultant pour la société TEFID de la résiliation du contrat du 13 novembre 1964, ordonnant une expertise pour évaluer le montant du dommage et rejetant les conclusions reconventionnelles de la commune ;

vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de FONTENAY-LE-FLEURY a la requête de première instance :

- considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965 : "l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois a compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1 . en matière de plein contentieux" ; qu'a la suite de la requête gracieuse que la société TEFID lui avait adressée le 25 juillet 1972 la commune de FONTENAY-LE-FLEURY ne lui avait notifie aucune décision expresse de rejet ; que par suite la commune de FONTENAY-LE-FLEURY n'est pas fondée a soutenir que c'est a tort que le tribunal administratif de Versailles a écarté la fin de non-recevoir qu'elle avait opposée a la requête de la société TEFID ; sur la responsabilité de la commune a raison de la résiliation du contrat :

- cons.

- qu'en vertu de l'article 279 du code des marchés publics, tel qu'il résultait du décret du 28 novembre 1966 : "les marches des collectivités et établissements énumérés a l'article 249 donnent lieu a adjudication sauf exceptions prévues aux articles 294 a 317 et 321 ci-dessous" ;

- que l'article 310 du même code tel qu'il résultait du décret du 28 novembre 1966 précisait : "des marches peuvent être conclus de gré a gré pour les travaux, services et fournitures dont la valeur n'excède pas pour le montant total de l'entreprise 60 000 f dans les communes, syndicats de communes et districts urbains ayant une population comprise entre 5 000 et 20 000 habitants" ;

- cons.

- que le contrat conclu de gré a gré le 13 novembre 1964 entre la commune de FONTENAY-LE-FLEURY et la société TEFID a été modifie par un avenant passe selon la même procédure le 4 décembre 1968 et qui a pris effet au 1er janvier 1969 ;

- que par cette nouvelle convention l'entreprise s'engageait a effectuer un enlèvement quotidien des ordures ménagères et qu'en contrepartie la commune lui consentait un prix de base de 29,95 f par habitant et par an ;

- qu'il résulte du recensement général de population effectue en 1968 que la commune de FONTENAY-LE-FLEURY comptait au 1er janvier de cette année 12 035 habitants ;

- qu'en conséquence la valeur totale du marche résultant de cet avenant ainsi que la valeur totale du marche tacitement reconduit pour une nouvelle période de six ans a compter du 1er janvier 1971 excédaient la limite fixée par l'article 310 précité pour la conclusion de marches de gré a gré par les communes ayant une population comprise entre 5 000 et 20 000 habitants ;

- qu'aucune autre disposition du code des marches alors en vigueur ne permettait a la commune de FONTENAY-LE-FLEURY de se soustraire a la procédure de l'adjudication ;

- que des lors le marche qui liait, a compter du 1er janvier 1971, par tacite reconduction du marche précédent la commune et la société TEFID était nul et n'a pu faire naitre d'obligation valable a la charge de la commune ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Versailles doit être annule en tant qu'il a déclaré la commune de FONTENAY-LE-FLEURY responsable des conséquences dommageables résultant pour la société TEFID de la résiliation du contrat litigieux ;

Sur le droit a indemnité de la société TEFID :

- cons.

- que l'entrepreneur dont le contrat est entaché de nullité est fondé a réclamer, en tout état de cause, le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles a la collectivité envers laquelle il s’était engagé ;

- que dans le cas ou la nullité du contrat résulte, comme en l'espèce, d'une faute de l'administration, l'entrepreneur peut en outre prétendre a la réparation du dommage imputable a cette faute et le cas échéant, demander a ce titre, le paiement du bénéfice dont il a été privé par la nullité du contrat si toutefois le remboursement a l'entreprise de ses dépenses utiles ne lui assure pas une rémunération supérieure a celle a laquelle il aurait eu droit en application des stipulations du contrat ;

- qu'il appartient des lors au juge, lorsqu'il est saisi d'une demande tendant a la réparation des dommages imputes a la faute de service, de déterminer le montant des sommes dues a l'entrepreneur au titre de ses dépenses utiles ;

- que c'est seulement dans l'hypothèse ou l'indemnité ainsi calculée serait inferieure au prix résultant du contrat qu'il y a lieu de rechercher si le préjudice qui en résulte doit être supporte en totalité ou en partie, dans la limite de ce prix, par la collectivité dont la faute est a l'origine de la nullité du marche ;

- que par suite il y a lieu de modifier, compte tenu de ce qui précède, la mission confiée par le tribunal administratif de Versailles a l'expert qu'il a désigné ; [annulation de l'article 1er du jugement ; commune requérante déclarée responsable des conséquences dommageables résultant pour l'entreprise TEFID de la nullité du marche renouvelé le 1er janvier 1971 ; expertise pour déterminer l'indemnité éventuellement due a la société compte tenu des dépenses utiles qu'elle a effectuées et des somme s effectivement perçues par elle durant la période d'exécution du marche]

Voir également

Contrat nul et droit à l’indemnisation du cocontractant

Indemnisation des frais de présentation de l'offre

Indemnisation pour éviction irrégulière et réparation du préjudice

Jurisprudence

CE, 26 sept. 2007, n° 259809, OPHLM du Gard (Absence Une personne publique ayant conclu un marché entaché de nullité et n’ayant pas fait naitre d’obligations entre les parties peut exercer une action en répétition de l’indu)

CAA Marseille, 9 juillet 2007, n° 05MA01087, Cie générale eaux c/ Commune Frontignan (Illégalité des bons de commande n'entrainant pas la nullité du marché et rejet de la demande indemnitaire fondée sur les terrains des responsabilités quasi-contractuelle et quasi-délictuelle)

CAA de Marseille, 25 juin 2007, n° 03MA00359, Société de transports Galiero (Conditions de réparation du préjudice né de l'éviction irrégulière d'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public).

CAA Paris, 20 mars 2007, n° 04PA04003, Société GETRONICS FRANCE venant aux droits de la SOCIETE OSLY FRANCE (Indemnisation de prestations effectuées sans marché, partage des responsabilités entre le prestataire et l'Etat sur le fondement de l'enrichissement sans cause en résultant pour l'Etat. Remboursement de celles de ses dépenses utiles, à l'exclusion de tout bénéfice, engagées par l'entreprise pour assurer les prestations dont l'administration a profité)

CE, 29 décembre 2006, n° 273783, Société Bertele SNC c/ Commune de LENS (Un règlement de consultation qui retient comme premier critère d’attribution des offres la qualification professionnelle des entreprises est illégal. Conditions d'indemnisation)

CE, 18 juin 2003, n° 249630, Groupement d'entreprises solidaires ETPO Guadeloupe, Société Biwater et Société Aqua TP (Règles d'indemnisation d'un candidat injustement évincé)

CAA Douai, 28 mai 2003, n° 00DA00663, Entreprise Delattre c/ Commune d'Amiens (Conditions d'indemnisation d'une entreprise privée d'une chance sérieuse de remporter un marché compte tenu du caractère irrégulier de la procédure d'appel d'offres)

CE, 23 mai 1979, n° 00063, commune de Fontenay-le-Fleury (Notion Tacite reconduction équivalant à la passation d'un nouveau contrat. Nullité du contrat et droit à l’indemnisation du cocontractant. Un avenant au contrat initial, conclu de gré à gré, avait pour effet d'augmenter la valeur totale du marché au point de dépasser le seuil applicable à cette procédure. Le Conseil d'État a jugé cet avenant nul, considérant qu'il conduisait à un contournement des règles de mise en concurrence applicables aux marchés dépassant un certain seuil. Cet arrêt met en évidence la position initiale de la jurisprudence, qui interdisait tout dépassement de seuil, quel que soit le motif de la modification. Cette approche visait à garantir le respect strict des procédures de passation des marchés publics et à prévenir tout risque de favoritisme ou de manque de transparence).