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CAA Bordeaux, 11 mars 2008,  req n° 06BX00950 et 06BX02599, Compagnie AGF c/ Département de l'Aveyron

CAA Bordeaux, 11 mars 2008,  req n° 06BX00950 et 06BX02599, Compagnie AGF c/ Département de l'Aveyron

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000018802615

Des modalités de révision du prix d'un marché marché d'assurance qui sont définies par des pièces particulières, notamment l'acte d'engagement et le cahier des clauses techniques particulières,  l'emportent sur celles des conditions générales et particulières du contrat qui seraient en contradiction avec elles y compris celles issues du Code des assurances.

Dès lors, les dispositions d'une police collective d'assurance, ne sauraient être regardées comme permettant à la société d'assurance de réviser unilatéralement le montant de la prime annuelle, et donc le prix du marché, notamment lorsque le cahier des clauses techniques particulières prévoit un seuil limite d'augmentation.

Vu I) la requête, enregistrée le 5 mai 2006 au greffe de la cour sous le n°06BX00950, présentée pour la Compagnie AGF, dont le siège est 87, rue de Richelieu à Paris (75002), par Me Porcher ;

Elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 26 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a notamment déclaré que la résiliation par la société AGF du marché d'assurances la liant au département de l'Aveyron est intervenue aux torts et griefs de la société AGF ;
- de condamner le département de l'Aveyron à lui verser une somme de 6 318,36 euros correspondant au solde de la prime d'assurance ainsi qu'une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient

- que c'est à bon droit que le tribunal a préalablement estimé que les dispositions combinées du Code des assurances et du Code des marchés publics et des stipulations contractuelles permettaient une révision des primes d'assurance et que la résiliation pouvait être demandée par l'assuré en cas de refus ;

- qu'en revanche, c'est à tort qu'il a estimé que la décision de résiliation par AGF se fondait sur les dispositions de l'article L. 113-4 du Code des assurances et qu'elle n'était donc pas justifiée en l'absence d'une aggravation du risque ;

- qu'en effet, la révision de la prime n'est pas intervenue en conséquence d'une aggravation du risque mais d'une révision pour partie en relèvement général des tarifs d'AGF dans le cadre d'une politique économique conjoncturelle encore qu'il soit lié à l'aggravation générale des risques ;

 

Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2006, présenté pour le département de l'Aveyron par Me Vacarie ;
Il demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de réformer le jugement précité du 26 janvier 2006 en tant qu'il a rejeté sa demande indemnitaire au titre des conséquences des sinistres relatifs aux ouvrages d'art et de génie civil ;
- de condamner la société AGF à lui rembourser les sommes d'un montant total de 536 863,59 euros qu'il a versées au titre des sinistres relatifs aux ouvrages d'art et de génie civil, ces sommes devant être assorties des intérêts légaux, et des intérêts des intérêts, à compter du 10 février 2004 ;
- de la condamner également à lui verser une indemnité de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice occasionné par la résiliation ;
- de la condamner enfin à lui verser une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative ;

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a préalablement estimé que les dispositions de l'article L. 113-4 du Code des assurances et de l'article 11-II des conditions générales relatives à une révision de prime à l'échéance annuelle étaient applicables dès lors qu'elles sont contraires aux clauses de l'article 4-2 de l'acte d'engagement et de l'article 7 du cahier des clauses techniques qui prévoient exclusivement une indexation du prix calculé forfaitairement en fonction du taux fixé à l'acte d'engagement et de la surface totale assurée ; qu'à supposer que les dispositions de l'article L. 113-4 soient applicables, c'est à juste titre que le tribunal a estimé que la réalisation de la condition d'aggravation du risque n'était pas démontrée par AGF ; que cette dernière n'apporte aucun élément nouveau en appel puisque, bien au contraire, elle se borne à faire état d'un relèvement général des tarifs sans aucune considération de la situation particulière de l'assuré ; qu'au surplus, la résiliation ne pouvait intervenir sur le fondement de l'article L. 113-4 du Code des assurances dès lors que le département a refusé de payer non la prime ou une fraction de prime mais l'augmentation de prime unilatéralement imposée ; que c'est à tort que le tribunal a estimé que le contrat d'assurance ne concernait que les bâtiments et non les ouvrages d'art et de génie civil, ces derniers étant visés par un document signé par le représentant d'AGF et annexé à l'acte d'engagement ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 janvier 2008 produit pour la société AGF qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu II) la requête, enregistrée le 26 décembre 2006 au greffe de la cour sous le n° 06BX02599, présentée pour la société AGF dont le siège social est 85, rue de Richelieu à Paris (75002), par Me Porcher ;
Elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 6 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser une somme de 73 348,73 euros au département de l'Aveyron en réparation du préjudice subi par ce dernier par suite de la résiliation du marché d'assurances passé avec le département ;
- de condamner le département de l'Aveyron à lui verser une somme de 6 318,36 euros correspondant au solde de la prime d'assurance ainsi qu'une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative ;
Elle se prévaut des mêmes moyens que ceux développés dans sa requête n° 06BX00950 et analysés ci-dessus ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 février 2007, présenté pour le département de l'Aveyron par Me Vacarie ;
Il demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de réformer le jugement précité du 6 décembre 2006 en tant qu'il a rejeté sa demande de condamnation de la société AGF à lui verser une indemnité de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'il a subi, postérieurement au 10 novembre 2003, par suite de la résiliation du contrat d'assurances ;
- de condamner la société AGF à lui verser une indemnité de 20 000 euros ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative ;
Il soutient qu'il a bien subi un préjudice postérieurement au 10 novembre 2003 dès lors que, d'une part, il a dû rechercher dans l'urgence un nouvel assureur, suivre une procédure d'appel d'offres et souscrire un nouveau contrat et que, d'autre part, les conditions et garanties de ce nouveau contrat sont moins favorables (franchise, exclusion vol et bris de glace) ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2007, présenté pour la société AGF ;
Elle conclut aux mêmes fins que la requête ainsi qu'au rejet de l'appel incident présenté par le département de l'Aveyron ;
Elle se prévaut des mêmes moyens en faisant valoir en outre qu'elle ne saurait être comptable des conditions de tarification et de franchise d'un contrat lui étant étranger ; que cette circonstance démontre d'ailleurs que les conditions du contrat résilié appelaient bien un ajustement ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 janvier 2008 pour le département de l'Aveyron qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le Code des marchés publics ;
Vu le Code des assurances ;
Vu le Code de justice administrative ;

Considérant que, par requête enregistrée sous le n° 06BX00950, la société AGF fait appel du jugement du 26 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a notamment déclaré que la résiliation du contrat d'assurances la liant au département de l'Aveyron est intervenue à ses torts et griefs ; que, par requête enregistrée sous le n° 06BX02599, elle fait appel du jugement en date du 6 décembre 2006 par lequel le même tribunal l'a notamment condamnée à verser une somme de 73 348,73 euros au département de l'Aveyron en réparation du préjudice subi par ce dernier par suite de ladite résiliation ; que ces requêtes sont dirigées contre deux jugements se rapportant à la même demande ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Considérant que par marché public signé le 3 décembre 1999, le département de l'Aveyron a confié à la société AGF, pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2000, la garantie des dommages causés à des biens dont il est propriétaire ou locataire ; que la société AGF a, après mise en demeure et suspension de la garantie, résilié le contrat à compter du 10 novembre 2003 en l'absence de paiement par le département de l'Aveyron de la fraction de prime correspondant à la majoration décidée par la société AGF et excédant, selon le département, celle prévue par les clauses contractuelles d'indexation ;

Sur les conclusions d'appel présentées par la société AGF :

Considérant que la société AGF soutient en appel s'être fondée, pour appliquer la majoration litigieuse, non sur une aggravation des risques au sens des dispositions de l'article L. 113-4 du Code des assurances mais sur le relèvement de ses tarifs dans le cadre d'une politique conjoncturelle liée à une aggravation générale des risques en se prévalant exclusivement de l'article 11-II de la police collective d'assurance ;
Considérant qu'aux termes de l'article 275 du Code des marchés publics, dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du marché : « Qu'il soit forfaitaire ou unitaire, le prix est ferme lorsqu'il ne peut être modifié à raison des variations économiques ; dans le cas contraire, les conditions de détermination du prix de règlement sont expressément prévues par le marché » ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'acte d'engagement du marché signé le 3 décembre 1999 : « Les pièces constitutives du marché sont les suivantes par ordre de priorité : Pièces particulières : acte d'engagement, cahier des clauses particulières, conditions particulières du contrat, conditions générales et conventions spéciales ; Pièces générales : Code des assurances, Code des marchés publics » ;
Considérant que l'article 4-2 de l'acte d'engagement du marché prévoit que les prestations de la société AGF seront rémunérées moyennant le versement d'une prime de 622 901 francs, les modalités de variation des prix étant fixées par l'article 7 du Cahier des clauses techniques particulières ; que ce dernier stipule que le prix du marché reste ferme pendant un an et sera ensuite révisé une fois par an au 1er janvier, date d'échéance du contrat, par application d'une formule qu'il définit ; qu'aux termes de l'article 11-II de la police collective d'assurance C1 de la société AGF constituant les conditions générales prévues à l'article 2 de l'acte d'engagement et visées par les conditions particulières du contrat : « Révision de la prime à l'échéance annuelle : si les assureurs viennent à modifier les tarifs applicables aux risques garantis par le présent contrat, la prime sera modifiée en conséquence... » ;

Considérant que les modalités de révision du prix du marché sont définies par l'article 4-2 de l'acte d'engagement et l'article 7 du cahier des clauses techniques particulières ; qu'en vertu de l'article 2 de l'acte d'engagement, ces clauses l'emportent sur celles des conditions générales et particulières du contrat qui seraient en contradiction avec elles ; que, dès lors, les dispositions de l'article 11-II de la police collective d'assurance, laquelle ne figurait d'ailleurs pas au nombre des pièces constitutives du marché soumises à appel à la concurrence, ne sauraient être regardées comme permettant à la société AGF de réviser unilatéralement le montant de la prime annuelle, et donc le prix du marché, au-delà du seuil résultant de l'application de la formule définie à l'article 7 du Cahier des clauses techniques particulières ; qu'en conséquence, la société AGF ne pouvait se fonder sur le refus du département de payer la fraction de prime excédant ce seuil pour résilier le contrat conclu avec le département de l'Aveyron ;

 

Sur les conclusions d'appel incident présentées par le département de l'Aveyron :

Considérant en premier lieu qu'il ressort des pièces contractuelles, et notamment du document intitulé « Intercalaire - ouvrages de génie civil » devant être annexé à l'article 3-3 des conditions contractuelles particulières relatif à l'assurance des ouvrages d'art et de génie civil en vertu de la réserve n° 7 à l'acte d'engagement, que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif de Toulouse, le contrat d'assurance signé le 3 décembre 1999 avait pour objet de garantir non seulement les dommages aux bâtiments, contenus et biens assimilés mais aussi les dommages matériels directs subis par les passages, tunnels routiers et fluviaux, châteaux et réservoirs d'eau, ouvrages de soutènement ainsi que les unités de traitement des déchets, de traitement des eaux et les unités de stockage ; que, cependant, en se bornant à produire une liste de sinistres consécutifs aux intempéries du 3 décembre 2003, le département de l'Aveyron n'établit pas qu'un ou plusieurs des ouvrages ainsi limitativement énumérés auraient subi des dommages couverts par les garanties prévues contractuellement ;
Considérant en second lieu que le département de l'Aveyron ne produit pas plus en appel qu'en première instance les pièces justifiant, d'une part, des frais engagés à l'occasion de la nouvelle procédure d'appel d'offres qu'il a été contraint de lancer et, d'autre part, des sommes ayant pu rester indûment à sa charge à la suite d'éventuels sinistres compte tenu des conditions moins avantageuses du nouveau contrat d'assurances qu'il a dû souscrire ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que la société AGF n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués des 26 janvier et 6 décembre 2006, le tribunal administratif de Toulouse a déclaré que la résiliation était intervenue à ses torts et griefs, a rejeté ses conclusions reconventionnelles tendant au paiement par le département de l'Aveyron de la fraction de prime contestée et l'a condamnée à verser une indemnité au département de l'Aveyron en réparation du préjudice subi de ce fait par ce dernier et, d'autre part, que le département de l'Aveyron n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 6 décembre 2006, le tribunal administratif de Toulouse a limité le montant de l'indemnité mise à la charge de la société AGF à 73 348,73 euros correspondant au montant hors taxe des sommes que la société AGF aurait dû lui rembourser, en application des stipulations du marché du 3 décembre 1999, à la suite de sinistres ayant endommagé des bâtiments dont le département était propriétaire ou locataire ;

Sur l'application de l'article L761-1 du Code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative font obstacle à ce que le département de l'Aveyron, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, soit condamné à verser à la société AGF la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de condamner la société AGF, partie perdante pour l'essentiel, à verser à ce titre une somme de 1 300 euros au département de l'Aveyron ;

 

DECIDE :
Article 1er : Les requêtes présentées par la société AGF sont rejetées.
Article 2 : Les appels incidents présentés par le département de l'Aveyron sont rejetés.
Article 3 : La société AGF versera une somme de 1 300 euros au département de l'Aveyron en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société AGF et au département de l'Aveyron.

MAJ 20/03/08 - Source legifrance

Jurisprudence

CE, 12 juillet 2023, n° 469319, Grand port maritime de Marseille (Marché public d’assurance résilié par l’assureur, l’acheteur peut s’y opposer et imposer de poursuivre l’exécution du contrat pendant la durée strictement nécessaire. Articulation entre les dispositions de l’article L113-12 du code des assurances et les principes généraux applicables aux contrats administratifs).