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Pouvoir adjudicateur et associations du secteur médico-social (Question AN n° 18662 de Mme Danielle Brulebois)

30 mai 2019

Une association du secteur médico-social, personne morales de droit privé, peut-elle être qualifiée de pouvoir adjudicateur ? (Question AN n° : 18662 de Mme Danielle Brulebois - 21/05/2019).

 

Cas de soumission d'une association aux règles de la commande publique

Une association est soumise aux règles de la commande publique dans les cas suivants :

  • si elle est un pouvoir adjudicateur,
  • si elle est une association transparente,
  • si elle agit comme mandataire d'une personne elle-même soumise aux dispositions du droit de la commande publique.

L'article L1211-1 du code de la commande publique fixe les règles pour savoir si les associations du secteur médico-social, personnes morales de droit privé, peuvent être qualifiées de pouvoirs adjudicateurs.

Il convient alors :

D'apprécier si elles ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel et commercial

Notion d'intérêt général

La notion d'intérêt général est interprétée au sens large par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).

Les associations du secteur médico-social, personnes morales de droit privé, à but non lucratif, visent précisément à satisfaire les besoins de santé de la population. Il semble dès lors difficile de considérer que leur activité ne constituerait pas une activité d'intérêt général.

Les activités d'intérêt général poursuivent-elles un but autre qu'industriel ou commercial ?

Pour apprécier si des activités d'intérêt général poursuivent un but autre qu'industriel ou commercial, la CJUE se fonde sur un faisceau d'indices liés aux circonstances ayant présidé à la création de l'entité et aux conditions dans lesquelles celle-ci exerce son activité.

En l'espèce ces associations à but non lucratif, qui sont pour certaines soumis à l'interdiction de facturation de dépassement des tarifs fixés par l'autorité administrative et des tarifs d'honoraires prévus au 1° du I de l'article L162-14-1 du code de la sécurité sociale et qui sont soumis à certaines obligations spécifiques prévues à l'article L6112-2 du code de la santé publique, peuvent être considérés comme satisfaisant un but d'intérêt général autre qu'industriel ou commercial.

Remplissent-elles une des trois conditions suivantes ?

Leur activité est-elle financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur ?

Le critère du financement public peut être rempli si les financements unilatéraux sans contrepartie de prestations rendues, et notamment les subventions, sont majoritaires.

Leur gestion est-elle soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur ?

Le critère de la gestion soumise au contrôle d'un pouvoir adjudicateur pourrait être rempli pour certaines associations. Le contrôle requis se caractérise par la capacité d'influencer les décisions de l'organisme concerné. Ce doit être un contrôle actif. Il semble impossible d'affirmer, d'une manière générale, que le critère de la soumission de la gestion à un contrôle d'un pouvoir adjudicateur serait rempli.

Leur organe d'administration, de direction ou de surveillance est-il composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur ?

Il n'est pas exclu que le critère de la gouvernance soit rempli par certaines associations. En application de la jurisprudence, ce critère est rempli lorsque, du fait de la composition des organismes d'administration, de direction ou de surveillance, un pouvoir adjudicateur dispose d'un poids lui permettant d'exercer une influence décisive sur les décisions les plus importantes et les orientations stratégiques de l'entité. En conséquence, il convient d'analyser au cas par cas si ce critère alternatif est rempli.

Conclusion

En conclusion, et contrairement à ce qu'affirme la compagnie nationale des commissaires aux comptes, il n'est pas possible de considérer, d'une manière générale, voire pour certaines catégories seulement d'association, du secteur médico-social, que la qualification de pouvoir adjudicateur doit être écartée. Seule une étude au cas par cas est susceptible de permettre de se prononcer sur ce point.

 

Source : QE AN n° 18662 - 21/05/2019 (Notion de pouvoir adjudicateur pour les associations du secteur médico-social).

 

L'avis (CE, 11 avril 2024, n° 489440) du Conseil d'Etat

Il est à noter que dans un avis de 2024 le Conseil d'Etat a répondu à cette question.

La cour administrative d'appel de Bordeaux, par son arrêt n° 21BX01064 du 14 novembre 2023, avait décidé de transmettre au Conseil d'Etat le dossier d'une requête de la région Nouvelle-Aquitaine sur ce sujet.

Actualités

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Jurisprudence

TA Paris, 13 juin 2024, n° 2225483 (Qualification de pouvoir adjudicateur d’une association dont la part des ressources versée par des pouvoirs adjudicateurs, a excédé le taux de 50%. Application de l'article L1211-1 du code de la commande publique, qui transpose l'article 2 de la directive du 26 février 2014 et reprend le contenu de l'article 10 de l'ordonnance du 23 juillet 2015. En l’espèce, le tribunal a fondé sa décision sur plusieurs arguments dont 1/ La part majoritaire de financement public. Le fait que l'association ait reçu une subvention importante du FAMI, un instrument financier public, démontre que son activité est majoritairement financée par des pouvoirs adjudicateurs. 2/ Le contrôle par l'État français. L'État français exerce un contrôle important sur le programme FAMI en France, notamment en définissant les priorités et les règles d'éligibilité. Ce contrôle s'étend aux bénéficiaires des subventions, comme l'association Centre Primo Levi, qui doivent respecter certaines obligations en matière de passation de marché. 3/ La nature d'intérêt général de l'activité. Le projet de l'association Centre Primo Levi s'inscrit dans le cadre d'une mission d'intérêt général, à savoir l'aide aux personnes exilées victimes de violence. Cette mission d'intérêt général renforce le lien entre l'association et les pouvoirs adjudicateurs).

CE, 11 avril 2024, n° 489440 (Les personnes morales de droit privé gestionnaires des établissements et services sociaux et médico-sociaux énumérés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, y compris les organismes à but lucratif, sont ils des pouvoirs adjudicateurs au sens du b) du 2° de l'article L1211-1 du code de la commande publique ?).