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Interdiction de renoncer aux intérêts moratoires

Contrats publics > Informations et actualités des marchés publics

Interdiction de renoncer aux intérêts moratoires dans un marché public. Requalification d'une concession d'aménagement en marché public en l'absence de transfert du risque lié à l'exploitation.

L'article 67 de la loi n° 94-679 du 8 août 1994 interdit de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dans un marché public. Un contrat d’aménagement qualifié de concession est en fait un marché public dès lors que la rémunération du cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'opération. Le protocole transactionnel renonçant aux intérêts moratoires est alors illégal dans un tel cas (CE, 18 mai 2021, n° 443153, Cté d’agglomération de Lens-Liévin).

25 mai 2021

La commune de Liévin a confié, par un contrat conclu le 12 août 1991, l'aménagement de la friche Sabès à Liévin à la société immobilière de construction de Liévin. Ce contrat a été repris tant par la communauté d'agglomération de Liévin, venue aux droits de la commune de Liévin, que par la société Territoires 62, succédant à la société Adévia qui avait elle-même succédé à la société Artois Développement, laquelle était venue aux droits de la société immobilière de construction de Liévin.

Par une délibération du 17 mars 2006, la communauté d'agglomération a clôturé l'opération d'aménagement de la friche, en arrêtant le déficit à la somme de 857 664,64 euros. Par une délibération du 1er juin 2015, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération a autorisé son président à signer un contrat de transaction avec la société Territoires 62, en vue de lui régler une somme égale à ce déficit, en contrepartie de la renonciation de cette société à réclamer des intérêts moratoires qui s'élèvent à la somme de 158 746 euros et de son désistement ou renonciation de toute action relative à l'exécution du contrat. La transaction a été signée le 13 août 2015.

Des élus du conseil communautaire ont alors contesté devant le tribunal administratif de Lille la validité de ce contrat de transaction. Le tribunal administratif a annulé ce protocole transactionnel sauf à ce que le conseil communautaire une nouvelle délibération autorisant la signature de ce contrat. La cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement ainsi que le protocole transactionnel. La communauté d'agglomération saisit alors le Conseil d’Etat.

Il est interdit de façon absolue de renoncer aux intérêts moratoires dans un marché public

La haute juridiction rappelle que l'article 67 de la loi n° 94-679 du 8 août 1994 interdit de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics, que cette renonciation intervienne lors de la passation du marché ou postérieurement.

"Dans le cadre des marchés publics, y compris les travaux sur mémoires et achats sur factures, est réputée non écrite toute renonciation au paiement des intérêts moratoires exigibles en raison du défaut, dans les délais prévus, soit du mandatement des sommes dues, soit de l'autorisation d'émettre une lettre de change-relevé, soit du paiement de celle-ci à son échéance. / La présente disposition est applicable à toute clause de renonciation conclue à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi."

Cette disposition est aujourd’hui codifiée à l'article L2192-14 du code de la commande publique.

La cour administrative d'appel de Douai n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'interdiction de la renonciation au paiement des intérêts moratoires était susceptible de s'appliquer à un protocole transactionnel relatif à un litige né d'un contrat, alors même que ce contrat avait été conclu avant l'entrée en vigueur de la loi du 8 août 1994.

La requalification de la concession d'aménagement en marché public dès lors que la rémunération du cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'opération

Par ailleurs, en vertu du code des marchés publics dans sa version applicable à la date de conclusion du traité de concession, un marché public est un contrat conclu par les collectivités publiques en vue de la réalisation de travaux, fournitures et services en contrepartie d'un prix.

Les dispositions de l'article L300-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable, n'ont toutefois pas pour effet de soustraire au respect des règles régissant les marchés publics les contrats confiant à un tiers l'étude et la réalisation d'opérations d'aménagement prévues par le code de l'urbanisme dans sa version alors applicable, s'ils entrent dans le champ de l'article 1er du code des marchés publics alors applicable.

Or, il ressort des pièces du dossier que les stipulations de l'article 5 du contrat, prévoient que : « L'opération de concession est réalisée sous le contrôle de la ville et à ses risques financiers » et « que les stipulations des articles 25 et 28 du cahier des charges prévoient en outre que la personne publique contractante s'engage à contribuer au remboursement des annuités des emprunts garantis du titulaire, si ses recettes ne suffisent pas y pourvoir, et que le titulaire perçoit une rémunération globale et forfaitaire pour ses frais généraux et de fonctionnement ».

La Cour d’appel en a déduit que le concessionnaire n'a pris aucun risque financier dans cette opération, le concédant, c'est-à-dire la collectivité publique, supportant seul tous ces risques.

Il s'ensuit que le contrat litigieux, bien que formellement conclu en qualité de concession d'aménagement, dès lors que la rémunération du cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'opération d'aménagement, constitue un marché public.

Un protocole transactionnel renonçant aux intérêts moratoires est illégal dans un marché public

En jugeant que la méconnaissance de la règle prohibant la renonciation aux intérêts moratoires, laquelle entache d'illicéité le contenu du protocole transactionnel, est de nature à justifier son annulation, la cour n'a pas commis d'erreur de droit et a exactement qualifié les faits dont elle était saisie.

Il en résulte que le Conseil d’Etat rejette les pourvois de la communauté d'agglomération de Lens-Liévin et de la société Territoires 62 pour annuler l’arrêt de la CAA de Douai.

Jurisprudence

CE, 18 mai 2021, n° 443153, Cté d’agglomération de Lens-Liévin (Interdiction de renoncer aux intérêts moratoires dans un marché public. Requalification d'une concession d'aménagement en marché public en l'absence de transfert du risque lié à l'exploitation).

CE, 17 octobre 2003, n° 249822, Ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales c/ Syndicat intercommunal d'assainissement le Beausset, la Cadière, le Castellet (Illégalité d’une transaction par laquelle le titulaire du marché renoncerait à tout ou partie des intérêts moratoires, quelle que soit sa date d'intervention).

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